Novembre 2014-décembre 2017 : Abdallah Dionne entre actif et passif-La dette publique, angle d’attaque de l’opposition

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Mahammed Boun Abdallah Dionne est en passe de battre le record du Premier ministre Macky Sall en logeant plus de trois ans à la Primature. Ce temps a-t-il été suffisamment long pour accélérer une cadence alourdie par les tergiversations du nadir du régime issu de la Seconde alternance, qui a donné naissance au PSe avec une douleur de maïeutique? Demain, le Pm aura l’occasion de délivrer un bilan de presque fin de mandat, dont voici les grandes lignes, à quelques encablures de 2019.

Quand M. Dionne était nommé Premier ministre en 2014 en remplacement de Mme Aminata Touré, l’ex-patron du BOSS (Bureau d’opérationnalisation et de suivi du Plan Sénégal Émergent) était chargé d’accélérer la cadence, comme ce fut la feuille de route du Pm Macky Sall en avril 2004; là ou ses prédécesseurs étaient plutôt occupés à nettoyer les écuries d’Augias, à travers l’activation ou la réactivation de guillotines comme l’OFNAC (en mode silence depuis quelque temps) et la CREI (qui semble avoir disparu de la carte judiciaire). Abdoul Mbaye Mbaye et Mimi Touré accordaient la même importance à la maitrise de la cherté du coût de la vie, (baisse du prix du loyer et construction de logements sociaux) conformément aux promesses de campagne phares du président de la République.
« Au travail !», lançait le Premier ministre Habib Thiam au lendemain de sa nomination en janvier 1981, Mahammed Boun Abdallah Dionne s’appropriera la formule dès les premiers jours de sa Primature, pour se départir du poids des concepts pompeusement énoncés jusque-là et traduire le Plan Sénégal Émergent en réalisations sensibles sur le réel vécu de ses compatriotes. Il fallait au nouveau régime, engagé dans un processus de « Dawadisation », des infrastructures grandioses pour éclipser les « Éléphants bleus » du pape du Sopi.
Un taux de croissance de 6,8 % à la veille de 2018
Depuis lors, le taux de croissance qui était de 4,5 % est tendanciellement haussier. Il est projeté à 6,8 % en fin 2017. Un pic qui n’est pas atteint depuis 2006, alors que le Sénégal venait de bénéficier, quelques années plus tôt, de l’Initiative multilatérale d’allègement de la dette en faveur des Pays pauvres très endettés (Ppte). Cette tendance haussière de la croissance devrait être effective jusqu’en 2019.
Ainsi, à la veille de 2018 (décrétée « année sociale » à la faveur du dernier remaniement, avec 42 % des dépenses affectées à cette matière), l’État du Sénégal peut se permettre d’allouer 40 milliards au Programme national des Bourses de sécurité familiale. Là où le Pudc (Programme d’urgence de développement communautaire), qui va en 2018 se passer de l’assistance technique du Pnud, a fait construire 210 forages à la date du 6 mars 2017 et hérite d’un budget de 300 milliards de F Cfa (dont 60 milliards grâce à la coopération chinoise). Dans le cadre de la lutte contre le chômage et le sous-emploi, un Fonds national pour l’entreprenariat rapide, avec une dotation initiale de 30 milliards  F CFA dès 2018, a été porté sur les fonts baptismaux. PROMOVILLES bénéficie de 8 milliards. Pendant ce temps, Ila Touba, le plus grand projet infrastructurel de tous les temps lancé au Sénégal, va bientôt être achevé grâce aux 20 milliards qui seront décaissés en 2018. L’Aéroport international Blaise Diagne, entamé sous le régime de Wade, est parachevé : le décollage est prévu cette semaine. L’aéroport et le projet de TER ont une corrélation directe avec la nouvelle ville de Diamniadio, sortie de terre sous la primature de Dionne pour dégraisser le mammouth Dakar à la démographie galopante. Cinq instituts universitaires ont vu le jour où sont en train d’être parachevés. Au plan énergétique, en outre de jouir par une opération du St-Esprit de ressources pétrolières et gazières grandioses, l’Etat du Sénégal s’est engagé dans une politique de mix-énergétique, avec l’inauguration de centrales solaires. La SENELEC se porte mieux, en ne dépendant plus des subventions, et les coupures intempestives d’électricité ont sensiblement diminué.
L’alourdissement de la dette inquiète le Fmi et la Banque mondiale 
Malgré ses réalisations, le niveau de la dette publique, commenté récemment par le Président Abdoulaye Wade en des termes qui empruntent leur champ lexical à l’Apocalypse, alimente le prisme déformant de l’opposition.
Même si après une évaluation, Moody’s juge stable la perspective de la note Ba3 de la dette souveraine, le Fonds monétaire international (Fmi) et la Banque mondiale alertent conjointement sur la hausse de celle-ci. En septembre 2017, le Fmi qui venait d’achever une mission de revue au Sénégal dirigée par M. Ali Mansoor, a conclu : « Le service de la dette qui était de 24% des recettes en 2014, pourrait atteindre 30% en 2017 ».
Le Patronat peine à endiguer la concurrence des entreprises étrangères  
Qui plus est, une bonne partie du secteur privé national donne l’air de ne pas partager les fruits de la croissance, en l’absence d’un dispositif protectionniste digne du patriotisme économique rendu hautement souhaitable par la mise en perspective historique de la signature des Ape (Accord de partenariat économique). C’est le cas de Baïdy Agne qui, lors des Assises de l’Entreprise tenues durant  le premier trimestre de 2017, a jugé nécessaire de renforcer  le dispositif de financement des Pme. Plus radical,  Mansour Kama, à l’occasion du Conseil présidentiel sur l’investissement de novembre 2017, n’a pas mis de gants pour reprocher au chef de l’État la percée des entreprises non-nationales, notamment celles marocaines et la mise à l’écart du privé national relativement à la réalisation des Grands travaux initiés par le gouvernement.
Ces contradictions entre gouvernement et secteur privé  font qu’il est difficile d’estimer le niveau de réalisation de la promesse de création de 500 000 emplois, le temps d’un septennat. Sous ce rapport, en 2014, le Pm Dionne annonçait que le programme des DAC (Domaines agricoles communautaires) allait permettre  de générer, à terme, 180 000 nouveaux emplois directs. Ce qui est en porte-à-faux avec les chiffres rendus publics par le chef de l’Etat lors de son adresse la Nation du 31 décembre 2016. « A ce jour, il (ledit programme) a permis de créer plus de 11 000  emplois, de former 8 570 jeunes et de soutenir 533 jeunes entrepreneurs agricoles déjà actifs », dixit Macky Sall. La manière dont l’ex-DG Jean Pierre Senghor a été débarqué quatre jours après cette adresse du chef de l’Etat indique que les fruits n’ont pas tenu la promesse des fleurs.
Le programme des DAC, avec le Programme d’Accélération de la Cadence de l’Agriculture Sénégalaise (PRACAS) et d’autres programmes sectoriels, devraient tendre vers l’atteinte de l’objectif d’autosuffisance en riz projeté en 2017. Un autre rendez-vous manqué avec l’Histoire, puisque le Sénégal n’est pas encore autosuffisant, en ce domaine, nonobstant le grand bond en avant enclenché par les services de Pape Abdoulaye Seck.
« La réalité de notre tissu économique, c’est aussi la prédominance d’un secteur informel, concentrant 95 % des emplois et plus de la moitié du PIB, avec de faibles niveaux de productivité, ainsi qu’un déficit commercial lourd et en aggravation, représentant, par moments, près de 20% du PIB, mais aussi un tissu industriel en difficulté », diagnostiquait Abdallah Dionne, en novembre 2014. Trois ans après, quelle est la réalité de ce tissu économique? On le saura quand le Premier ministre aura terminé sa déclaration de politique générale ce mardi.
Dakaractu

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