VIVRE ENSEMBLE POUR MIEUX VIVRE (Par le Pr Lamine NDIAYE)

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Vivre ensemble, une nécessité pour la (sur)vie de l’humanité. N’avons-nous pas appris, tout au long du parcours historique, à vivre ensemble pour domestiquer la nature afin d’entrer définitivement dans l’histoire ? Ce qui est sûr, c’est que, en songeant à humaniser l’environnement, nous sommes devenus des êtres de culture, dans le sens anthropologique du terme. Ce qu’il faut comprendre, en fait, c’est la « réalité » selon laquelle le « vivre-ensemble » n’exclut ni la contradiction ni le conflit ; l’essentiel étant le désir commun d’aller de l’avant. D’ailleurs, aux yeux de beaucoup de penseurs, il n’existe pas de relation humaine tissée en dehors d’un rapport conflictuel. Autrement dit, le conflit fonde notre humanité agissante. Dans cette perspective, les rapports humains, fondateurs du vivre ensemble, sont, en définitive, la traduction d’une relation de rivalité bien comprise, assumée et dépassée. De la sorte, il est bien plus judicieux de prendre le conflit pour un bien, à la fois matériel et spirituel, qu’il importe de placer sous le signe du normal et non pas du pathologique en ce qu’il participe de la bonne santé d’une société. Surtout quand l’action conflictuelle peut se définir la présence de forces opposées dans un même espace dont les membres sont appelés à cohabiter, avec sérénité. Ainsi, parle-t-on de « conflit démocratique » dont l’une des caractéristiques est d’entretenir la diversité des positions conflictuelles. Le Chef de l’État sortant, M. Macky Sall, a certainement compris, à suffisance, le sens des risques encourus, voire des dangers sociaux, culturels, économiques, politiques et juridiques qui rôdent dans nos murs déjà « inclinés ». De ce point de vue, comme tout bon Sénégalais, soucieux de l’avenir de son pays et de l’Afrique, averti des enjeux du moment et du futur, en appelle-t-il à la concorde nationale ! Mais, comment peut-on gouverner une société, qui semble être en déliquescence, si on ne se donne pas les moyens de prôner l’ouverture articulée autour d’une vision concertée des politiques de gouvernance nationale fondamentales ? La voie est ainsi tracée au Peuple sénégalais qui a prouvé aux yeux de l’humanité, pendant l’élection présidentielle du 24 mars 2024, qu’il est résolument apte à prendre son destin en main. Le temps de la pandémie de COVID-19 nous avait permis, largement, de percevoir et d’apercevoir, en contribuant à mieux comprendre le sens et la signifiance, l’intérêt d’un dialogue national dont la « communauté tout entière » adhère aux principes qui n’ont pas fini de s’accorder avec la réalité. Le coronavirus, en exigeant, dans l’une de ses fonctions disciplinaires, la distanciation sociale, la peur de l’autre, l’omniprésence de la souillure « contaminante », l’illusion de la mort partout, avait interpellé notre conscience, à nous tous, en nous interdisant moralement de nous séparer, de nous diviser. Unis, nous devons l’être, pour la paix et l’équilibre social souhaités. Pourtant, pendant ce temps, des contradictions religieuses apparentes et des conflits idéologiques politiquement sensés ponctuent la vie des Sénégalais. Ce n’est pas un sacrilège ! Car, de la contradiction, naît la vérité. L’essentiel, c’est d’avoir la ferme conviction de ne pas franchir, sciemment et en toute quiétude, la norme, de ne pas dépasser les bornes. Ce faisant, évitera-t-on d’être en déphasage avec les croyances, les us et coutumes socialement institués parce qu’une telle transgression serait dommageable pour tous. En effet, dans les moments de crise et en situation de difficultés senties et ressenties, l’appel au vivre ensemble devient la solution idéale. L’adage africain nous le rappelle : « Nit nitay garabam » (« L’Homme est le remède de l’Homme »). D’où, par rapport à « nos » représentations socioculturelles, le recours à la Palabre africaine, stratégie traditionnelle de régulation des éventuelles tensions sociales, doit être de mise. N’oublions pas que la palabre africaine, c’est « la violence prise humainement dans la discussion, soumise à l’action efficace de la toute-puissance du verbe ». Sous ce rapport, l’appel au dialogue national, condition d’un vivre ensemble meilleur, est un moyen assuré de remodelage du sentiment d’unité, de recomposition du « Tout social » , dont dépend notre développement, qui allait se détraquer. En réalité, il ne s’agit pas de prendre une quelconque « défaillance » politique ou bien des interventions publiques, quelquefois mal orientées, comme la marque d’une gouvernance étatique boîteuse ou « chavirante ». Ce qu’il faut, pour un bien-être partagé, c’est d’éviter le chaos en procédant à l’identification objective des acteurs multiples qui participent, consciemment ou inconsciemment, volontairement ou involontairement, à organiser et à discipliner le vivre ensemble. Dans ce contexte, des dispositifs de recadrage du social s’offrent à nous. Les espaces, les catégories, les temporalités, les imaginaires et les symboles, les conflits indécents sont administrés en vue de redéfinir les liens sociaux afin de les raffermir davantage. Les appartenances sont ainsi façonnées, les médiations jouées et l’ordre social recomposé. Enfin, mobilisons-nous autour de l’essentiel car le sérieux de notre vie ne peut se réaliser que si, et seulement si, les dirigeants décident de vivre ensemble. Car nul n’est plus intelligent que les autres. Ce dont nous avons besoin et qui urge, c’est la contribution de tous, chacun dans son domaine et d’arrêter de profiter du système sans rien donner en retour. Lamine NDIAYE Professeur titulaire de Classe exceptionnelle Sociologie et Anthropologie Directeur de l’Institut Confucius Ancien coordonnateur des Écoles doctorales de l’UCAD

Vivre ensemble, une nécessité pour la (sur)vie de l’humanité. N’avons-nous pas appris, tout au long du parcours historique, à vivre ensemble pour domestiquer la nature afin d’entrer définitivement dans l’histoire ? Ce qui est sûr, c’est que, en songeant à humaniser l’environnement, nous sommes devenus des êtres de culture, dans le sens anthropologique du terme.
Ce qu’il faut comprendre, en fait, c’est la « réalité » selon laquelle le « vivre-ensemble » n’exclut ni la contradiction ni le conflit ; l’essentiel étant le désir commun d’aller de l’avant. D’ailleurs, aux yeux de beaucoup de penseurs, il n’existe pas de relation humaine tissée en dehors d’un rapport conflictuel. Autrement dit, le conflit fonde notre humanité agissante. Dans cette perspective, les rapports humains, fondateurs du vivre ensemble, sont, en définitive, la traduction d’une relation de rivalité bien comprise, assumée et dépassée.
De la sorte, il est bien plus judicieux de prendre le conflit pour un bien, à la fois matériel et spirituel, qu’il importe de placer sous le signe du normal et non pas du pathologique en ce qu’il participe de la bonne santé d’une société. Surtout quand l’action conflictuelle peut se définir par la présence de forces opposées dans un même espace dont les membres sont appelés à cohabiter, avec sérénité. Ainsi, parle-t-on de « conflit démocratique » dont l’une des caractéristiques est d’entretenir la diversité des positions conflictuelles. Le Chef de l’État sortant, M. Macky Sall, a certainement compris, à suffisance, le sens des risques encourus, voire des dangers sociaux, culturels, économiques, politiques et juridiques qui rôdent dans nos murs déjà « inclinés ». De ce point de vue, comme tout bon Sénégalais, soucieux de l’avenir de son pays et de l’Afrique, averti des enjeux du moment et du futur, en appelle-t-il à la concorde nationale !
Mais, comment peut-on gouverner une société, qui semble être en déliquescence, si on ne se donne pas les moyens de prôner l’ouverture articulée autour d’une vision concertée des politiques de gouvernance nationale fondamentales ? La voie est ainsi tracée au Peuple sénégalais qui a prouvé aux yeux de l’humanité, pendant l’élection présidentielle du 24 mars 2024, qu’il est résolument apte à prendre son destin en main. Le temps de la pandémie de COVID-19 nous avait permis, largement, de percevoir et d’apercevoir, en contribuant à mieux comprendre le sens et la signifiance, l’intérêt d’un dialogue national dont la « communauté tout entière » adhère aux principes qui n’ont pas fini de s’accorder avec la réalité. Le coronavirus, en exigeant, dans l’une de ses fonctions disciplinaires, la distanciation sociale, la peur de l’autre, l’omniprésence de la souillure « contaminante », l’illusion de la mort partout, avait interpellé notre conscience, à nous tous, en nous interdisant moralement de nous séparer, de nous diviser. Unis, nous devons l’être, pour la paix et l’équilibre social souhaités.
Pourtant, pendant ce temps, des contradictions religieuses apparentes et des conflits idéologiques politiquement sensés ponctuent la vie des Sénégalais. Ce n’est pas un sacrilège ! Car, de la contradiction, naît la vérité. L’essentiel, c’est d’avoir la ferme conviction de ne pas franchir, sciemment et en toute quiétude, la norme, de ne pas dépasser les bornes. Ce faisant, évitera-t-on d’être en déphasage avec les croyances, les us et coutumes socialement institués parce qu’une telle transgression serait dommageable pour tous.
En effet, dans les moments de crise et en situation de difficultés senties et ressenties, l’appel au vivre ensemble devient la solution idéale. L’adage africain nous le rappelle : « Nit nitay garabam » (« L’Homme est le remède de l’Homme »). D’où, par rapport à « nos » représentations socioculturelles, le recours à la Palabre africaine, stratégie traditionnelle de régulation des éventuelles tensions sociales, doit être de mise. N’oublions pas que la palabre africaine, c’est « la violence prise humainement dans la discussion, soumise à l’action efficace de la toute-puissance du verbe ». Sous ce rapport, l’appel au dialogue national, condition d’un vivre ensemble meilleur, est un moyen assuré de remodelage du sentiment d’unité, de recomposition du « Tout social », dont dépend notre développement, qui allait se détraquer.
En réalité, il ne s’agit pas de prendre une quelconque « défaillance » politique ou bien des interventions publiques, quelquefois mal orientées, comme la marque d’une gouvernance étatique boîteuse ou « chavirante ». Ce qu’il faut, pour un bien-être partagé, c’est d’éviter le chaos en procédant à l’identification objective des acteurs multiples qui participent, consciemment ou inconsciemment, volontairement ou involontairement, à organiser et à discipliner le vivre ensemble. Dans ce contexte, des dispositifs de recadrage du social s’offrent à nous. Les espaces, les catégories, les temporalités, les imaginaires et les symboles, les conflits indécents sont administrés en vue de redéfinir les liens sociaux afin de les raffermir davantage. Les appartenances sont ainsi façonnées, les médiations jouées et l’ordre social recomposé.
Enfin, mobilisons-nous autour de l’essentiel car le sérieux de notre vie ne peut se réaliser que si, et seulement si, les dirigeants décident de vivre ensemble. Car nul n’est plus intelligent que les autres. Ce dont nous avons besoin et qui urge, c’est la contribution de tous, chacun dans son domaine et d’arrêter de profiter du système sans rien donner en retour.

*Lamine NDIAYE
Professeur titulaire de Classe exceptionnelle
Sociologie et Anthropologie
Directeur de l’Institut Confucius
Ancien coordonnateur des Écoles doctorales de l’UCAD

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