TABARA NDIAYE, FEMME FLIC

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On ne peut pas limiter le métier de policier aux forces et aux muscles. Tabara Ndiaye, commissaire, chargée des relations publiques de la Police nationale le montre bien. Professionnelle jusqu’à la semelle des bottes, elle parvient à jongler entre sa vie de famille et son métier. Dynamique, amoureuse et élégante…Une vraie domou ndar.

La pièce est spacieuse et bien ordonnée. Chaque objet est rangé à sa place, les documents superposés les uns sur les autres. « Prenez place », nous lance Commissaire Tabara Ndiaye, trouvée dans son bureau au premier étage de la Cité Police sise sur la Corniche Ouest, en face de la mosquée Omarienne. La fraîcheur dans cet endroit contraste avec la canicule qui règne à l’extérieur. Très élégante dans sa robe crêpe soie assortie d’un foulard gracieusement noué sur la tête, le visage discrètement maquillé, Tabara Ndiaye impose le respect. La forte personnalité qu’elle dégage en est une preuve. Toutefois, derrière cette femme à poigne se cache une personne serviable.

Tabara Ndiaye est, depuis avril 2017, le Chef du Bureau des Relations Publiques de la Police Nationale. Elle est chargée d’informer le public pour éviter qu’il y ait des malentendus entre la Police et la population, d’organiser des rencontres et fora afin de promouvoir l’image de l’institution et de sensibiliser les policiers dans le respect des droits humains. Une mission difficile et stressante, selon elle. Alors qu’elle était encore stagiaire, Tabara Ndiaye a été nommée à ce poste par l’inspecteur général de police Anna Sémou Faye. Une surprise. Elle a voulu savoir les raisons pour lesquelles la patronne de la police à l’époque l’avait nommée à ce poste. En bonne policière, elle mène discrètement une petite investigation qui a pu éclairer sa lanterne. « Un des proches m’a fait savoir que c’est parce que j’avais une forte personnalité qu’Anna avait décidé de me mettre à ce poste », explique-t-elle.

Puis, Anna Sémou Faye partie, elle a été affectée au commissariat central de Guédiawaye comme adjointe au commissaire. Chef de la sûreté urbaine, elle lui revenait, avec les éléments mis à sa disposition et sous la supervision du Commissaire central, d’effectuer des patrouilles nocturnes dans la banlieue afin de dissuader les personnes mal intentionnées, de rechercher et d’interpeller, en collaboration avec la Division de la Police Technique et Scientifique, tout individu ayant commis une infraction dans leur secteur de compétence et de procéder au transfèrement des mis en causes. « Deux ans plus tard, le Directeur de la Police nationale, Oumar Maal, m’a ramenée au Bureau des relations publiques. Il a dit qu’il me faisait confiance », confie-t-elle.

Une domou Ndar

Née à Saint-Louis, Tabara Ndiaye a fréquenté l’école primaire catholique Saint Joseph appelée Immaculée conception. Mais, elle n’y fait pas tout son cursus. Son père, postier à l’époque, avait été affecté à Kaolack. Comme tous les enfants de fonctionnaires, Tabara était obligée de quitter sa ville natale pour aller vivre à Kaolack. Ici, elle a été inscrite à l’école SOS village qui, le plus souvent, ouvrent ses portes aux enfants orphelins ou abandonnés dans la rue. « Je ne suis pas orpheline », s’empresse-t-elle de préciser. Son père avait choisi de l’inscrire dans cet établissement parce qu’il avait une bonne réputation. Elle n’est pas une surdouée mais, Tabara Ndiaye parvient à s’imposer dans cette école. Elle se fait remarquer grâce à ses excellents résultats qui n’étaient rien d’autre que le fruit de la rigueur de sa mère. L’entrée en sixième en poche, elle est orientée au Cem Djim Momar Mbaye où elle a fait une partie de ses études secondaires avant de rejoindre le lycée des jeunes filles John Fitzgerald Kennedy. En 2002, elle décroche son Bfem. Trois ans plus tard, elle décroche avec brio le sésame qui lui ouvre les portes de l’enseignement supérieur.

Elle est orientée à la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques (FSJP) de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Elle venait ainsi de réaliser l’un de ses rêves d’enfant. « C’était mon rêve d’être à la faculté de droit parce que j’aspirais à devenir magistrat. C’était mon rêve », déclare-t-elle avec fierté. Responsable et équilibrée, elle se concentre sur ses études. L’effectif pléthorique des étudiants dans l’amphi, les conditions difficiles de la fac ne la font pas décourager. Son objectif : obtenir la maitrise. Elle l’a eu après quatre années d’études universitaires, sans répit. En 2012, elle fait le concours du commissaire et le réussit. « J’ai fait trois ans de formation à l’école police. J’ai beaucoup trimé là-bas mais j’ai beaucoup appris également », confie-t-elle. Le fait qu’elle devienne commissaire ne surprend pas son entourage qui, déjà à huit ans, lui prédisait une belle carrière de magistrat ou d’avocat. Bref une femme de loi. »

« Une enfant terrible »

J’étais terrible. C’est pourquoi les gens me disaient que je serais avocate ou magistrat. J’aimais régler les conflits. Quand il se passait quelque chose à la maison, c’est moi qu’on appelait pour expliquer ce qui s’était passé alors que j’étais une gamine. Je relatais les faits tels qu’ils se sont déroulés. Je disais toujours la vérité sans chercher à incriminer qui que ce soit », se souvient-elle, très émotive. Avant d’ajouter : « En plus j’étais très forte et super-active. J’ai été même au concours général d’éducation physique mais, malheureusement je n’ai pas été lauréate parce qu’il y avait une fille qui était plus athlétique que moi. C’est pour toutes ces raisons que mon intégration n’a pas causé de problème. J’avais les atouts pour exercer cette profession », dit-elle avec modestie.
La profession de policier a toujours été considérée comme un métier d’homme. Mais pour Tabara Ndiaye les femmes ont également leur place. « On a subi une formation initiale comme les hommes. Il y a même des femmes qui ont supporté plus que les hommes. J’ai vu des hommes vomir. Cela nous a réconfortés et nous a permis de nous dire qu’on a notre place dans ce milieu ».

Aujourd’hui, le premier défi de Tabara Ndiaye, c’est de faire connaitre aux populations la mission de la police. Elle travaille d’arrache-pied pour que les rapports entre les forces de l’ordre et les citoyens soient des meilleurs. Et elle se réjouit que les choses s’améliorent. « Je vois que les gens commencent à nous comprendre. Il nous tolère plus. Nous n’avons pas intérêt à placer les gens en garde à vue pour le plaisir. Nous le faisons pour que tout le monde soit en paix. C’est notre seul but », indique le commissaire. Femme de tenue, Tabara Ndiaye est également épouse et mère de quatre enfants.

Très organisée, elle a sa technique pour concilier son travail et son ménage. Même si elle avoue que ce n’était pas facile au début, elle renseigne qu’elle parvient, maintenant à gérer son foyer tout en exerçant convenablement son métier. D’ailleurs, elle a trouvé une domestique qui l’aide dans les tâches ménagères. De plus, elle envoie trois de ses enfants à la crèche. Mais, si tout cela est devenu possible c’est parce qu’il a eu un époux qui le comprend et qui le soutient, sans faille. « J’ai un époux qui est assez compréhensif. Il me comprend parce qu’il est capitaine de la gendarmerie », s’enorgueillit-elle. Ndar-Ndar pure souche, Tabara Ndiaye ne fait pas partie du cercle de ces intellectuelles qui chargent toutes les tâches ménagères à la domestique. Cordon bleu, elle prépare de plats appétissants à. monsieur à chaque fois que le temps le lui permet. « C’est dans l’ordre normal des choses qu’une femme s’acquitte de ses tâches ménagères », laisse entendre la policière. Comme quoi l’habit ne fait pas le moine !

EMEDIA

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