Star en Italie, il a plus d’adeptes que Mark Zuckerberg et est devenu une icone des médias sociaux… sans jamais dire un mot.
À l’heure où tout le monde donne son avis sur tout sur les réseaux sociaux, il réussit sans dire un mot. Ces dernières semaines, il était difficile d’échapper à une des vidéos satiriques de Khaby Lame, de son vrai nom Khabane Lame, un jeune Sénégalais vivant en Italie depuis 20 ans. TikTokeur presque anonyme parmi tant d’autres il y a deux mois, ses pastiches, dans lesquels ils se moque notamment des tutos qu’il trouve sur le réseau, sont désormais suivi par 62,3 millions de personnes dans le monde. Dont 700000 nouveaux adeptes sur la seule matinée qu’a pris l’écriture de cet article.
Ses abonnements ont commencé à monter en flèche depuis deux mois. 6 millions le lundi 12 avril, 14 millions trois jours plus tard, puis 23,8 millions, etc., jusqu’à aujourd’hui faire partie du Top 100 mondial du réseau dominé par l’influenceuse Charli d’Amelio, et être le premier « influenceur » italien… alors qu’il n’en a même pas encore la nationalité comme il le souligne lui-même.
C’est le Covid qui a indirectement jeté ce jeune homme de 21 ans, né au Sénégal mais vivant à Chivasso dans la banlieue turinoise depuis que ses parents y ont immigré quand il avait un an, sur la route du succès. La crise sanitaire lui a en effet fait perdre son emploi dans une société de matériel numérique : confiné et désœuvré, il s’est jeté à corps perdu sur TikTok lors du premier confinement, avec une proposition à la fois simple et drôlissime : tourner en ridicule les défis réalisés par d’autres utilisateurs et utilisatrices de la plateforme.
Sa vidéo à ce jour la plus populaire est ainsi une réponse à un tutoriel de découpe de bananes au couteau par un Tiktokeur. La solution du jeune homme est bien plus simple : épluchez-la avec vos mains. La simple expression de son visage désabusé, provoque l’hilarité et pas seulement de l’autre côté des Alpes.
Khaby Lame, silencieux dans ces vidéos, préfère en effet miser sur ses expressions de visage et sur une gestuelle proche du mime. Un mime Marceau mâtiné de Commedia Dell’arte en quelque sorte. Au bout d’un an, il avait déjà un million d’abonnés, un succès déjà très honorable… avant que le compteur n’explose littéralement ce printemps, à la faveur des partages.
« Mon objectif est simplement de divertir les gens »
« Pour être honnête, je ne m’attendais pas du tout à ce succès mondial » a confié le Piémontais au Corriere della Sera. « La chaîne a connu un boom et j’essaie maintenant de la maintenir à ce niveau. Cependant, le classement pour moi n’est qu’un chiffre. Bien sûr, je suis heureux d’être le premier en Italie, mais mon objectif est simplement de divertir les gens » a commenté le Sénégalais.
Comment analyse-t-il son succès? « Même avant l’explosion, la chaîne se portait bien rappelle le Tiktokeur. Un million de followers est un chiffre très respectable. Mais ensuite, j’ai posté une vidéo qui est devenue encore plus virale et j’ai remarqué que les gens aimaient mon expression faciale. Alors j’ai continué » s’amuse-t-il.
Depuis toujours attiré par la comédie, notre star est désormais aux portes de la jet set, et apparaît aux côtés d’autres vedettes de la péninsule dans ses petites vidéos, comme ici avec la mannequin et chanteuse Oriana Sabatini, compagne du joueur star de la Juventus, Paulo Dybala.
Son succès est tel que même sur une autre plateforme, il bat des records. Khaby a ainsi surpassé le « boss » de Facebook, maison mère d’Instagram, sur cette dernière. Il compte ainsi 16,7 millions d’abonnés contre 7,5 millions à Mark Zuckerberg, à qui il a d’ailleurs envoyé un message taquin : « Patron, en seulement deux semaines ». Pas bégueule, Zuckerberg lui a répondu avec l’émoticône pouce levé, « fair-play ».
Le jeune homme compte capitaliser sur son succès pour en faire son métier « C’est mon grand désir, j’ai déjà plusieurs projets en tête » s’avance-t-il auprès du quotidien transalpin, désireux de se «mesurer à d’autres plateformes comme Twitch et YouTube ». De l’ambition mais des pieds bien sur terre pour celui qui n’a pas oublié son quartier populaire : « c’est un endroit auquel je dois tout ». Mais aussi ses proches et ses parents. « Ils m’ont donné une éducation et m’ont permis de me cultiver. Je pense aussi aux amis avec lesquels j’ai grandi en jouant au football dans la cour de récréation. À travers TikTok ce serait un rêve pour moi de pouvoir les aider un jour.»
Le Parisien
