QUEL DÉVELOPPEMENT POUR NOS ÉTATS ?

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etats

Qu’est-ce que je dois dire ?

Qu’est-ce que j’ai à dire ?

Qu’est-ce que je peux dire ?

Comment dois-je le dire ?

 

Sur un développement durable, devons-nous nous pencher !

Ces notes cursives permettent de poser le débat et d’envisager l’esquisse d’une solution sur laquelle, tôt ou tard, il faudra s’intéresser pour venir au secours de l’Afrique.

 

Et j’ai très vite compris qu’il s’agit de cogiter sur l’essentiel, sur le sérieux pour la survie. Invite ne peut alors être plus grande, intéressante, pertinente et décente que de réfléchir sur notre humanité en souffrance, blessée par des « guerres » gangréneuses, dont on peine à trouver le sens ou à donner de la signifiance. La guerre ukrainienne, le génocide palestinien, ce dangereux conflit opposant Iran et Israël et qui souffle le vent pollué d’une possible hostilité mondiale,  ne devraient pas avoir lieu car il s’agit de faits extrêmement graves et qui n’ont pas emprunté la voie qui mène vers une direction sensée…C’est, tout simplement, un non-sens, fruit de l’imprudence humaine, ayant échappé à notre vigilance.

Nous ne devons pas « faire comme si », « vivre avec » ou bien « faire avec », comme c’est le cas avec la COVID 19 dont on n’est pas absolument sûr qu’elle soit une œuvre humaine. Ne nous est-il pas permis de penser que c’est la Nature, voire les choses, qui se sont vengées contre nous pour nous mettre au pas parce que, par le mépris de l’environnement et de l’humain, nous ne les respectons pas ?

La guerre n’est pas dictée par la loi de la nature ; elle est l’œuvre des hommes au pouvoir. Ces derniers, insatiables, avides de pouvoir qu’ils ne souhaitent pas perdre, veulent, partout et chaque fois que de besoin, asseoir leur domination. Ainsi, oublient-ils qu’aucune créature humaine n’est un « éternel physiquement » et que notre éternité si, toutefois, elle est à rêver, peut être rêvée, est autorisée à s’offrir au rêve qui se dresse contre la rêverie, ne se mesure qu’à l’aune de nos réalisations. Souhaitons que celles-ci soient enviables, ne serait-ce que pour le bonheur et pour la paix de la postérité. « Nopa mag boroom », dit l’adage wolof (« L’âge de l’oreille est beaucoup plus avancé que celui de la personne », propos dont un bon enfant du Kajoor sait mesurer le sens et l’apprécier à sa juste valeur.

De ce point de vue, il est de notre responsabilité, à nous tous, de mobiliser nos énergies intelligentes afin que la guerre ne soit plus cette « solution » dramatique, c’est-à-dire que l’usage, quelquefois abusif, de la raison aveuglée, force du mal agissant, ne nous empêche pas de vivre chaque jour. L’heure de la « parole » de la raison doit sonner en prenant la place des armes qui tonnent. Le temps de la destruction n’est plus de mise car l’humanité a bien souffert des conflits guerriers qui, jusque-là, n’ont pas encore fait la preuve de leur efficacité.

La « parole-sauveur » ou « rédemptrice » semble s’offrir, aujourd’hui, au continent africain qui, s’il compte sur ses fils ayant la tête sur les épaules, peut raisonner le monde en phase de déliquescence, en prenant humainement la violence dans la discussion pour la soumettre à l’action efficace de la toute-puissance du verbe qui ne défait pas, mais fait et unifie. C’est ce rapport à la parole toute puissante et créatrice qui a fondé la diplomatie sénégalaise et continue de la nourrir depuis Senghor, même si cette dernière a connu quelques blessures qui sont appelées à se cicatriser, avec le temps.

Nous n’aurons pas la prétention d’égrainer les actes de taille posés par les diplomates sénégalais, sous les auspices des différents Chefs d’État qui se sont succédé, des indépendances à nos jours. Quelques temps forts méritent un rappel mais, pour les besoins du moment, il nous semble plus opportun de nous focaliser davantage sur le rôle joué par le Sénégal et la place qu’il occupe dans l’échiquier politique international, pour promouvoir une paix mondiale durable et un développement partagé, legs des prédécesseurs dont il a su entretenir la continuité, preuve assurée d’une « diplomatie de consensus national ».

 

Pour la « petite » histoire

 

Grande est cette histoire !

Pouvons-nous douter de la qualité de la diplomatie sénégalaise si, toutefois, nous devons nous en tenir à la place privilégiée occupée par l’État sénégalais, grand pays à la petite superficie de 196 712 km2 et avec une population qui avoisine les 18 millions ? Nous n’en doutons pas. Et, pour preuve, nous devons nous souvenir de la réalité historique selon laquelle le Sénégal a compté parmi ses illustres fils :

 

– le premier député africain, Blaise Diagne (1872-1934), élu à la Chambre des députés française, en 1914 ;

– le premier juriste noir de l’Afrique française, Me Lamine Gueye (1891-1968), panafricaniste de première heure, député du Sénégal au Palais Bourbon (1945-1951), Sénateur de la Communauté (1958-1959) et défendeur de la cause des Noirs des colonies française donnant naissance à la loi du 7 mars 1946, portant sur l’étendue de la qualité de citoyen aux ressortissants des Territoires d’Outre-mer et aussi à la loi du 30 juin 1950 orientée vers l’égalité de traitements et d’avantages, sans distinction de race, de religion, de statut, aux fonctionnaires civile et militaires d’Outre-mer ;

– le premier agrégé noir en grammaire (1935), Léopold Sédar Senghor (1906-2001), député du Sénégal en 1946, ayant assuré diverses fonctions au Conseil de l’Europe, à l’UNESCO et à l’ONU, Secrétaire d’État français à la présidence du Conseil dans le cabinet d’Edgar Faure (1955-1956), ministre-conseiller du gouvernement de la République française (1959), élu à l’académie française (1983) et père fondateur de l’organisation de la francophonie ;

– le premier Africain, Directeur général de l’UNESCO, pendant 13 ans (1974-1987), Amadou Mahtar Mbow (1921) ;

– le premier africain, Directeur général de la FAO (1994-2011), pendant 18 ans, Jacques Diouf (1938-2019), pour l’éradication de la fin et l’amélioration d’une sécurité alimentaire et agricole durable, à travers le monde ;

– Ibrahima Fall (1942), sous-secrétaire général aux Droits de l’Homme de l’ONU et directeur général adjoint de l’Office des Nations Unies à Genève (1992-1997), sous-secrétaire général aux affaires politiques de l’ONU (New York) en charge des affaires politiques africaines (1997-2002), sous-secrétaire général et représentant spécial du secrétaire général de l’ONU pour la Région des Grands Lacs (2002-2007), envoyé spécial président de la Commission de l’Union Africaine pour la Guinée (2008-2010), Haut représentant de l’Union Africaine pour la transition au Tchad (2021) par décision du Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) de l’Union Africaine lors de sa 996ème réunion présidée par S.E. Moussa Faki Mahamat, Président de la Commission de l’UA, le 14 mai 2021 ;

– le Capitaine Mbaye Diagne, officier courageux tué au Rwanda, en 2014, en l’honneur de qui la première « Médaille de la bravoure » est décernée par l’ONU ;

– etc.

 

C’est cet héritage diplomatique honorable, orienté vers la défense des idéaux de paix, de justice et de sécurité internationale, qui a valu au Sénégal son élection, pour la 3ème fois de son histoire, comme membre permanent du Conseil de Sécurité des Nations Unies, de 2016 à 2017, par 187 voix sur 191, pour participer à la prise des grandes décisions qui engagent le monde. Ainsi, participe-t-il aux missions onusiennes de la paix en faisant partie des pays premiers contributeurs de troupes pour avoir occupé le 1er rang en Afrique de l’Ouest, le 3ème africain et le 7ème mondial.

Si le Sénégal s’octroie une place enviable au concert des Nations de grande diplomatie au point de devenir une « diplomatie d’influence », il faut bien reconnaître qu’il le doit à sa culture politique interne fondée sur le dialogue, sur l’ouverture, sur la « neutralité » et sur le     « commun-vouloir-vivre-ensemble » qu’il faut entretenir, en toute rigueur.

 

Le « nouvel ordre international » n’est-il pas en passe d’être défini par l’Afrique ?

 

Le 2 mars 2022, l’Assemblée générale de l’ONU (AGNU) votait une résolution. Cette dernière, intitulée « Agression contre l’Ukraine » émanant d’une décision de l’UE en accord avec l’Ukraine, était écrite en ces termes : « Que la Russie cesse immédiatement de recourir à la force contre l’Ukraine et retire immédiatement, complètement et sans condition toutes ses forces militaires » basées en terre ukrainienne. Avertissement, ultimatum ou menace ? Ce dont nous sommes sûr, c’est que sur les 193 pays participants, une large majorité a condamné la Russie au moment où 12 États africains n’ont pas voté et 17, parmi lesquels il faut compter le Sénégal, se sont abstenus.

Avec une tradition axée sur la neutralité et sur l’adoption du principe du non-alignement, la position du Sénégal n’est pas nouvelle, sur le plan diplomatique. Qu’on se souvienne de l’occupation russe de la Crimée, en 2014 et du conflit israélo-palestinien ! L’entretien téléphonique entre l’ancien président de la République du Sénégal et celui de la Russie, le 9 mars 2022 pour un arrêt de la guerre qui oppose la Russie et l’Ukraine, est révélateur. Lors de la rencontre des deux Chefs de  l’État sénégalais et russe, du 3 juin 2022, il a été question d’évoquer la crise alimentaire qui menace l’Afrique. Le mardi 20 septembre 2022, coïncidant avec  l’ouverture de la 77ème Assemblée générale des Nations unies, réunissant, à New York, des Chefs d’État et de gouvernement, l’Afrique, par la voix de ses dirigeants, a eu droit à la parole. Ces deux réalités historiques montrent, encore une fois de plus, que ce continent a son mot à dire dans le concert des Nations.

Durant cette réunion, d’obédience mondiale, le débat a porté, pendant près d’une semaine, sur la Guerre en Ukraine, le dérèglement climatique, la sécurité alimentaire, entre autres. Et ce qui est remarquable, c’est le fait que le Chef de l’État sénégalais soit le premier africain à communiquer sur l’avenir du monde, après le président brésilien, suivi des présidents des Seychelles, Wavel Ramkalawan, du Congo, Félix Tshisekedi, de la Centrafrique, Faustin-Archange Touadéra et du Chef du gouvernement marocain, Aziz Akhannouch. Cette réalité historique nous en dit beaucoup sur le rôle que le Sénégal peut jouer comme médiateur d’un monde en perte d’équilibre.

Ce rappel, s’il faut bien comprendre sa signification, est un appel non directif, une réflexion simple et sommaire, une allusion, au travers duquel nous montrons ce que nous sommes et que le déni, l’oubli ou la négligence peuvent nous empêcher de voir en face.

Enfin, cette réflexion se poursuit à travers un texte portant sur quelques défis que « nos » États africains  doivent relever pour se développer.

 

 

Lamine NDIAYE

Professeur titulaire de Classe exceptionnelle

Ancien coordonnateur des Écoles doctorales

Directeur de l’Institut Confucius

Université Cheikh Anta Diop de Dakar

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