Macky Sall et la boite de pandore de l’hubris (Par Yoro Dia)

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Où sont les bâtiments ou monuments qui incarnent le Sénégal indépendant ? Nulle part, à part les traces laissées par Wade, comme le monument de la Renaissance. Diamniadio ne doit pas être une finalité, mais la porte qui s’ouvre sur le pays et le continent

Napoléon Bonaparte disait : «Ce que je cherche, c’est avant tout la grandeur, tout ce qui est grand est beau.» D’où la beauté des pyramides, au pied desquels il a eu sa célèbre formule : «Soldats, songez que du haut de ces pyramides, quarante siècles d’histoire vous contemplent.» Aujourd’hui encore, les pyramides d’Egypte continuent de contempler le monde du haut de leurs quarante-deux siècles, avec autant de majesté et de beauté, parce qu’elles sont grandes donc belles, comme le Parthénon au sommet de la colline à Athènes, dont les ruines majestueuses rappellent la grandeur de la civilisation grecque, mais aussi celle du monument et sa beauté, comme c’est aussi le cas à Rome avec le Colisée, ou le Taj Mahal en Inde, la Grande muraille de Chine ou Petra, la ville bâtie dans la roche en Jordanie, qui sont autant de vestiges mais aussi incarnations de grandes civilisations et de grands pays.

Aujourd’hui, où sont les bâtiments ou monuments qui incarnent le Sénégal indépendant ? Nulle part, à part les traces laissées par Wade, comme le monument de la Renaissance. Où est-ce que le jeune Sénégalais peut rencontrer un symbole, un bâtiment ou un monument qui incarne la grandeur du Sénégal indépendant puisque Dakar-Plateau, le cœur de l’Etat, est un hymne architectural à la grandeur de la France coloniale, avec le Palais présidentiel (ancienne résidence du Gouverneur général), l’Assemblée nationale (ancienne assemblée territoriale de l’Afrique occidentale française) et le ministère des Affaires étrangères (le Tribunal de l’Aof). Puisque «l’architecture est de la musique figée», comme disait Goethe, la France coloniale a joué sa partition et a figé l’architecture de Dakar, ce qui fait que le Sénégal indépendant y est absent, d’où l’impossibilité pour des jeunes, d’y rencontrer leur Sénégal. Il est urgent de bâtir, mais surtout de bâtir grand. Le président Macky Sall a raison de voir grand avec le Ter. Ce que les Grecs appellent l’hubris, la démesure, folie des grandeurs, qui est un défaut pour un homme ordinaire, est la plus grande qualité d’un homme politique.

Heureusement que le Sénégal a eu en 2000, un Président comme Wade, qui a ouvert la boite de Pandore de l’hubris d’Etat, après quarante ans de manque d’ambition et de sobriété socialiste, qui s’est contentée de la rente architecturale coloniale. En 2000, à part l’encombrement, si Mesmer revenait à Dakar, il ne serait point dépaysé. Diamniadio ne doit pas être une finalité (désengorger Dakar), mais le début, la porte qui s’ouvre sur le pays et le continent, contrairement à Dakar qui est la porte qui s’ouvre sur l’Atlantique. Diamniadio est la première vraie ville bâtie par le Sénégal indépendant qui, par manque d’ambition, s’est contenté de bidonvilles, et Diamniadio n’est pas sur la côte comme l’aéroport de Diass, car petit à petit, le Sénégal déconstruit sa logique atlantiste pour regarder vers le continent, qui est notre avenir. Cette logique atlantiste, qui voulait qu’il soit beaucoup plus facile d’aller à Paris qu’à Kédougou.

C’est pourquoi le Ter à Diamniadio, qui n’est qu’un début, doit aller jusqu’à Tamba, qui est la porte qui nous ouvre le continent. Le Ter Diamniadio-Tamba. Quel grand projet ! Quelle grande querelle, mais comme disait Napoléon : «L’impossible est le refuge des poltrons… Etre grand, c’est soutenir une grande querelle.» Nous préférons des querelles politiques sur de grands projets, plutôt que les petites querelles sur le fichier électoral, qui ne font que l’affaire des rentiers de la tension électorale ou les armes de distraction massive de rentiers de la tension religieuse, comme la loi sur l’homosexualité, qui n’arrange que certains Ong en quête de financement occidental et des associations religieuses musulmanes, en quête de financement arabe.

L’argent du pétrole doit en grande partie, être consacré aux infrastructures et non pas à faire du social car, comme disent les Chinois, «quand vous faites du social, vous créez plus de social». En tout cas, depuis que les Chinois ont commencé à faire moins de social avec Deng Xiaoping et son slogan : «Enrichissez-vous !», la Chine a trouvé le chemin de l’émergence en fast-track. Je suis de ceux qui pensent qu’il est préférable d’avoir tort avec Deng, plutôt que d’avoir raison avec Mao. Napoléon a donné à la France le Code civil, la Cour des comptes, les préfets, le juge d’instruction, mais a surtout laissé des traces indélébiles dans l’architecture de Paris, comme l’Arc de Triomphe, une preuve par le béton que : «Tout ce qui est grand est beau.» Macky Sall a eu son deuxième mandat parce que, entre autres, il a remporté la bataille de la surenchère de la construction, qui l’opposait à Wade. Le Sénégal ne remerciera jamais Wade d’avoir ouvert la boite de Pandore de l’hubris, qu’aucun de ses successeurs ne pourra fermer.

Yoro Dia

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