Le Qatar aurait même soudoyé le ciel (Par Madiambal Diagne)

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Les dirigeants qataris n’ont pas fait mystère de leur mégalomanie ou ne se sont pas cachés quant au montant du budget alloué à l’accueil de la Coupe du monde 2022 : 220 milliards de dollars. A titre de comparaison, la Russie avait déboursé 11,6 milliards de dollars pour la précédente édition, 15 milliards de dollars ont été dépensés en 2014 au Brésil et moins de 7 milliards de dollars pour les éditions précédentes.

Les Qataris ont construit six nouveaux stades et le pays a visé, à travers cette Coupe du monde, une continuité dans le programme de développement du pays. Outre les stades, ce sont d’innombrables infrastructures qui ont vu le jour dont des lignes de métro, des hôtels, des aéroports, des routes. Le Qatar a voulu montrer, à travers cet événement, la puissance mondiale qu’il est en train de créer ou que le pays voudrait se mesurer à ses voisins et non moins concurrents comme les Emirats arabes unis ou l’Arabie Saoudite. C’est un Mondial de la démesure et le Qatar a essuyé toutes les critiques pour cette arrogance, des critiques venant essentiellement du continent européen. Reste à se demander si toutes les critiques, qui semblent parfois dénoter une certaine condescendance, ont été justifiées.

Le Qatar accusé de tous les péchés

Les conditions dans lesquelles l’organisme du football mondial, la Fifa, avait décidé en 2010 d’attribuer l’organisation de la Coupe du monde 2022 au Qatar, ont été vivement décriées. De fortes suspicions de corruption ont fait les choux gras des médias. De grosses sommes d’argent auraient été distribuées à des personnalités influentes de la Fifa. Les différents acteurs ont fait dans la négation et au gré des postures, certains hauts dirigeants de la Fifa à l’époque, comme le Suisse Sepp Blatter (remplacé par Gianni Infantino à la tête de la Fifa), ont attendu par exemple la dernière semaine de l’ouverture du Mondial au Qatar, pour regretter le choix fait sur ce pays.

Des accusations de corruption ont aussi été évoquées sur le plan sportif. Des détracteurs de l’organisation de la Coupe du monde au Qatar avaient accusé les autorités de cet émirat pétrolier et gazier d’avoir cherché à soudoyer des joueurs de l’Equateur, premier adversaire du Qatar au match d’ouverture. On a bien vu que les Equatoriens avaient parfaitement respecté l’équité sportive et ont livré un match franc pour finir par battre le Qatar devant son public et leur Emir sur le score de 2 buts à 0. Leur autre adversaire du Groupe A, le Sénégal, n’a pas non plus fait dans la dentelle, battant lui aussi le Qatar sur le score de 3 buts à 1. Peut-être que s’il y aurait une équipe à acheter par le Qatar, ce serait celle des Pays-Bas pour le dernier match de leur groupe ce mardi 29 novembre 2022. A moins que seuls les joueurs et coaches des équipes du tiers-monde seraient corruptibles !

Pour les préparatifs de la Coupe du monde, le Qatar avait fait venir sur son sol plus de 1,7 million de travailleurs migrants provenant d’Inde, du Bangladesh, du Népal, de l’Ouganda, de la Zambie, entre autres. Ces travailleurs migrants voyaient ainsi une opportunité s’offrir à eux pour échapper à la situation de pauvreté dans leurs propres pays. Les conditions de travail inhumaines ont été dénoncées ainsi que le bas niveau de salaires payés à ces catégories de travailleurs. Les médias ont mis en exergue une «hécatombe», avec un nombre de 15 000 morts parmi ces travailleurs, en l’espace de douze ans. L’annonce n’a pas manqué de susciter un énorme émoi. Seulement, on ne peut pas ne pas relever que ce chiffre brut, rapporté à la population totale des travailleurs migrants, est de l’ordre de 17 morts pour 1000 personnes sur une période de douze années soit moins de 1,5 décès pour 1000 habitants par an. Le taux moyen de mortalité au Qatar est de 1,6 décès pour 1000 personnes. Allez voir les taux de mortalité en Inde, au Népal, au Bengladesh, qui sont quatre fois supérieurs !

Le Qatar a aussi été accablé pour des manquements ou des dégâts contre l’environnement du fait des méga-constructions prévues pour accueillir l’événement. Tout autre pays qui organise un événement de cette envergure construirait des stades, des routes, des autoroutes, des aéroports. Pour donner des gages, le Qatar a fait construire certains stades avec des matériels recyclés et des constructions démontables. Les critiques liées aux conditions climatiques, avec un niveau de chaleur ambiante qui dépasse en moyenne les 40 degrés Celsius, ont poussé à l’installation de climatiseurs dans les stades. Mais les Qataris ont trouvé une parade imprévue ou réussi une prouesse, celle de soudoyer les cieux pour que les thermomètres baissent à 24 degrés. Il n’était alors plus nécessaire de faire tourner les climatiseurs géants. N’en auraient-ils pas les moyens et le manque de scrupule ?

Le Qatar a été critiqué pour des violations des droits humains. C’est un secret de polichinelle que la monarchie qatarie est implacable contre ses adversaires ou tous objecteurs de conscience. Le pays est aussi connu pour ne tolérer aucune pratique sexuelle jugée déviante, et de lourdes sanctions sont prononcées contre les auteurs. Les droits de femmes qataries ont aussi été un sujet de préoccupation, surtout qu’elles ne pourraient voyager à l’étranger sans l’autorisation d’un tuteur mâle. C’est un archaïsme d’un autre âge, même si le Qatar ferait mieux que nombre de pays arabes ou musulmans sur le registre des droits des femmes. Seulement, sur ce registre de la démocratie, des libertés et des droits humains, peut-on dire qu’un pays comme la Russie par exemple, qui avait accueilli la Coupe du monde 2018, donnerait de meilleurs gages que le Qatar ? Assurément non ! Il reste que si cette logique de parangon des droits de l’Homme et des libertés devrait être suivie, il serait bien difficile, à travers les différentes régions du monde, de trouver des pays éligibles pour accueillir une Coupe du monde. Au demeurant, l’idée de bannir l’organisation de la Coupe du monde du Qatar pour un motif de pratiques anti-démocratiques et liberticides équivaudrait à ouvrir une boîte de Pandore. En effet, ils sont nombreux, les pays qualifiés à cette présente édition de la Coupe du monde et qui ne font pas mieux que le Qatar en termes de pratiques démocratiques, de respect des droits des femmes ou des personnes Lgbt ou de l’application de la peine de mort ou des droits des travailleurs migrants, ou en matière de discriminations liées au sexe, à la race ou à la religion.

Les belles réponses du Qatar à ses contempteurs

Les associations des alcooliques anonymes et autres organisations qui luttent contre l’alcoolisme devraient une fière chandelle au Qatar. L’interdiction de la vente d’alcool aux abords des stades a fini par être acceptée par tous les spectateurs. Peut-être que cela a participé à une certaine bonne ambiance, même festive et l’absence de débordements dans les stades. Sans doute que les visiteurs du Qatar ont bien compris qu’on ne va pas chez quelqu’un en lui exigeant de changer les règles d’accueil. A la vérité, personne n’a été obligé d’aller au Qatar. Pour autant, le public a assurément été au rendez-vous. Les préposés à la sécurité n’ont pas été trop éprouvés. Il faut dire que le déroulement de la compétition est jusqu’ici très paisible. Mieux, à chaque fois que leur équipe a été battue, les supporters qataris sont rentrés dignement et ont participé à la fête aux côtés des vainqueurs. La liesse de la célébration par les supporters saoudiens de leur victoire contre l’Argentine (2-1) à travers les rues de Doha suffit pour témoigner du bel état d’esprit, quand on connaît la mauvaise qualité des relations diplomatiques entre le Qatar et son grand voisin. Aurait-on déjà oublié le chaos de la finale de la Champion’s League européenne entre Liverpool et le Real Madrid l’année dernière au Stade de France à Paris ?

L’affluence est très forte. Les menaces de boycott du public n’ont pas eu d’effets. Les stades sont toujours bien garnis avec des supporters enthousiastes. Aussi, la compétition continue de battre tous les records de téléspectateurs. Mais c’est sur place qu’on mesure mieux combien le Qatar a parfaitement réussi son organisation. De nombreuses critiques sont ainsi apparues injustes ou relevant de fantasmes. Souligner cela pourrait apparaître aux yeux de certaines personnes comme d’avoir été acheté par le Qatar, qui n’aurait aucune vertu que de payer des satisfecit avec ses pétrodollars, mais force est de dire que les visiteurs du Qatar à l’occasion de cette Coupe du monde de football ont eu droit à une autre réalité sous leurs yeux. Les deux aéroports civils de Doha n’ont jamais été débordés par l’afflux des milliers de supporters. Le voyageur qui débarque à Doha ne passe pas plus de 10 minutes entre le débarquement, la police des frontières et le tapis des bagages. J’ai déjà eu à expérimenter les conditions à l’enregistrement au départ et à l’embarquement. Tout se passe également sans encombre et dans des délais très courts. Jamais on ne trouve une meilleure prise en charge dans un aéroport. Qui ne se rappelle pas les tracasseries dans les aéroports moscovites en 2018 où les passagers restaient de nombreuses heures en zone internationale avant de pouvoir entrer dans le pays ? Combien d’heures des passagers perdent encore d’ordinaire dans les aéroports internationaux français, américains, anglais ou allemands, pour des procédures et formalités de voyage ?

L’accès aux différents stades est aussi fluide, aucun embouteillage n’est déploré. Les routes élargies ont facilité ou rendu fluide la circulation, et le nouveau métro de Doha a permis de transporter gratuitement les grandes foules de supporters. Aux alentours des stades, des agents préposés au guidage du public sont disponibles. L’accueil est sympathique et l’atmosphère bon enfant. Les hôtels ont offert une qualité de service qui fait honneur au pays.

Le Qatar s’est vu éliminé au premier tour de sa Coupe du monde, mais il aura parfaitement réussi son organisation. Il a fait taire toutes les critiques. Les stades ont été des plus modernes et fonctionnels et aucune équipe n’a eu à se plaindre d’un quelconque avatar des pelouses et autres aires de jeu ou d’entraînement. L’animation des stades a été diversifiée et multiculturelle et la sonorisation impeccable.

Il reste à savoir ce qu’il faudra faire de toutes ces infrastructures au soir du 18 décembre 2022, date de la finale de la compétition. Le pays ne compte que quelque 2 millions 600 mille habitants, avec 80% d’étrangers, et ces infrastructures 5 XL apparaitront surdimensionnées. Des stades démontables sont promis à être offerts à d’autres pays et certains autres transformés en centres commerciaux.

Post-scriptum : «J’ai refusé de solliciter le Président Macky Sall pour les impôts sur mon projet de Mamelles.»

Suite à ma chronique de la semaine dernière intitulée : «Je ne cède pas au chantage au smartphone», un ami responsable du parti Pastef m’a interpellé pour souligner que j’aurais occulté la fiscalité de mon projet immobilier en cours de réalisation aux Mamelles. Je lui ai indiqué que je suis à l’aise pour évoquer cette question car j’avais effectivement bénéficié d’une exonération délivrée par l’Agence de Promotion des Investissements (Apix) après examen de mon dossier, comme c’est d’ailleurs le cas avec tout investisseur satisfaisant à certains critères.

Seulement, au moment de la mise en œuvre de cette exonération, il m’a été signifié que j’aurais besoin d’une décision spécifique du ministre des Finances et du budget. Le ministre Abdoulaye Daouda Diallo rechignait à donner son accord car il estimait devoir contrôler de manière parcimonieuse les exonérations. Ainsi, me demandait-il de solliciter le «Patron» (Macky Sall) pour l’instruire dans le sens de me faire bénéficier de l’exonération. Je lui avais clairement dit que ce ne sera pas nécessaire car je refuse de solliciter le président de la République pour cela. Ainsi, je n’ai pas pu profiter de ladite exonération et il est loisible à chacun de pouvoir le vérifier. Les banquiers et l’entreprise chargée des travaux ne pouvaient comprendre mon attitude. Qu’à cela ne tienne !

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