Esclavage : Pourquoi l’Amérique a refusé d’accueillir les musulmans wolofs?

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Interdire aux musulmans de venir en Amérique a existé. C’est le rappel fait, au quotidien  LeSoleil, par l’historienne Sylvianne Diouf. De père Sénégalais et de mère Française, ayant grandi en France, elle a également vécu à Dakar avant de s’installer aux Etats-Unis depuis 30 ans où elle est directrice d’un centre de recherche historique.

Premières interdictions

« Les premières interdictions datent du tout début du XVIème siècle », note Sylviane Diouf, directrice, depuis 15 ans, du Lapidus Center for the Historical Analysis of Transatlantic Slavery, une bibliothèque de recherche sur le monde noir spécialisée sur l’esclavage atlantique basée à New York. En effet, de 1500 à 1550, la couronne espagnole avait interdit aux musulmans africains, notamment wolofs, d’entrer en Amérique.

Les raisons de l’interdiction

Sylviane Diouf évoque deux raisons ayant conduit à cette décision. « D’abord, les Espagnols avaient peur que les musulmans convertissent les Indiens », commence l’historienne. Mais, il y a aussi le fait que les musulmans noirs, en particulier les Wolofs, étaient jugés incorrigibles et arrogants. « En 1522, la première révolte d’esclaves a été conduite par des Sénégalais en République dominicaine. Ils étaient les plus prompts à se révolter. Par exemple, les esclaves wolofs du Sénégal se révoltèrent sur la plantation – aujourd’hui située en République dominicaine – du fils de Christophe Colomb, jetant l’effroi dans le Nouveau Monde », poursuit l’universitaire.

Par la suite, il y a eu d’autres interdictions faites aux Wolofs musulmans. Sylvianne Diouf en énumère quatre autres. « Le 11 mai 1526, un décret royal interdisait l’introduction des Wolofs, des « Noirs du Levant », de ceux qui avaient été « élevés avec les Maures » et des peuples de Guinée sans autorisation spéciale de la « Casa de Contratacion » qui supervisait la traite.

Wolofs : « musulmans et auteurs de révoltes »

En 1532, un autre décret décrivait les Wolofs (qui s’étaient aussi révoltés à Porto-Rico et au Panama) comme étant «arrogants, désobéissants, rebelles et incorrigibles». Cet arrêt interdisait également l’entrée des mulâtres, des juifs, des moriscos (musulmans espagnols convertis de force) et des musulmans en général.

En 1543, un nouvel arrêté stipulait que, dans ces terres nouvelles où la foi s’était si récemment implantée, il était nécessaire d’empêcher l’expansion de la «secte de Mahomet» et barrait l’entrée des musulmans libres ou asservis et de leurs enfants récemment convertis au catholicisme parce qu’ils avaient causé des «inconvénients» par le passé.

En 1550, les «Noirs du Levant» et de Guinée étaient de nouveau bannis parce qu’ils étaient «mélangés aux Maures». Avec pas moins de cinq décrets antimusulmans au cours de ses cinquante premières années d’implantation en Amérique, l’Espagne pensait avoir mis un terme à l’islamisation potentielle de son empire ou à sa possible perte par rébellion ».

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