Cheikh Mahi Ibrahima Niass, intellectuel ouvert et apôtre de la paix

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L’art de diriger une communauté nécessite des talents et des qualités diverses, a-t-on l’habitude de dire. Cette pensée est bien comprise et épousée par Cheikh Mahi Niass. Le cinquième khalife de Médina Baye est décrit comme un homme modeste pour un khalife général, généreux, un savant hors pair.

Sa courtoisie est connue de tous. Mais il s’agit surtout d’un homme épris de paix comme en témoigne ses nombreux voyages durant lesquels il a eu à consolider des parties en conflit. Cheikh Mahi est au diapason de tout ce qui se passe dans le monde.

Un après-midi de juin 2023, alors qu’il devait recevoir à son domicile une délégation de l’Agence de presse sénégalaise (APS) conduite par son directeur général Thierno Ahmadou Sy, il n’y a mis aucune forme de protocole. Une approche peu commode chez les familles religieuses.

“Pas de flash ni de caméra s’il vous plaît’’, lance un de ses fils à l’endroit de la délégation. Preuve de sa simplicité, le Khalife était dans une tenue tellement décontractée que son entourage ne voulait pas que l’on immortalisa le moment. Mais c’était sans compter avec le degré d’humilité et l’esprit de dépassement du principal concerné. Papa Mahi comme l’appellent les proches, a fini par se poser avec presque tous les membres de la délégation sous le regard circonspect de son entourage.

Le khalife général de la fayda tidjania est un homme très cultivé. Avant de recevoir la délégation de l’APS à Médina Baye, le khalife confie : “J’ai tout de suite pris ma tablette pour me connecter et faire des recherches sur l’Agence de presse sénégalaise. Mais vous êtes là depuis plus de 60 ans et vous êtes un organe très respecté’’.

“Vous avez un puissant outil entre vos mains. La presse est utile dans un pays, mais elle doit être responsable et équilibrée’’, poursuit le khalife de Medina Baye dans un propos qui en dit long sur sa large culture générale.

Un panafricaniste ayant grandi sous l’aile de Kwame Nkrumah

Quoi de plus normal, le Khalife de Médina Baye a fait des études supérieures. Il est titulaire d’une maîtrise en sciences historiques de l’université Al Azhar en Egypte, obtenue en 1976. Cheikh Mahi Ibrahima Niass est d’un commerce facile. Il est affable et généreux dans le partage de ses connaissances.

Tous les jours, après la prière de Asr, il prend quartier sous un abri qui jouxte sa maison à Médina Baye. Sur une chaise pliante, radio transistor jamais loin, tablette à la main, il fait toujours de fines analyses sur tous les sujets d’actualité. Son attitude à s’adapter aux enjeux du moment et aux sujets contemporains quand il échange avec les jeunes générations étonne plus d’un.

 Ayant vécu plusieurs années aux cotés de Kwame Nkrumah, le fils de Baye Niass a développé au fil du temps la doctrine du panafricanisme. Brillant conférencier et grand intellectuel, il se réclame d’un panafricanisme originel.

“Beaucoup ne le savent pas. J’ai été éduqué par Kwame Nkrumah, ancien président du Ghana et l’un des pères du panafricanisme. Aujourd’hui, le panafricanisme est un vocable dévoyé et galvaudé. Moi je crois au panafricanisme prôné par Nkrumah. Je ne l’ai pas appris, je l’ai vécu. J’ai été éduqué par Nkrumah. Je vivais chez lui, avec lui sur proposition de mon père Cheikh Ibrahima Niass’’, raconte Cheikh Mahi à la délégation.

A son domicile, une imposante photo de l’ancien président ghanéen est accrochée dans le salon. “Moi, je crois en ce Monsieur et en son panafricanisme. Il était sincère et profond. Je ne crois pas aux nombreux vendeurs d’illusions et aux populistes qui se réclament du panafricanisme’’, confie-t-il en pointant du doigt la photo de Nkrumah.

Intellectuel hors pair

Né en 1938 à Kaolack, Cheikh Mahi Niass est surnommé Khadimoul Oummah (le serviteur de la Oummah). A l’âge de cinq ans, il est envoyé en Mauritanie par son père pour des études coraniques. A l’âge de sept ans, il mémorisa le Livre saint. Comme plusieurs de ses frères à l’époque, le jeune Mahi était envoyé en Mauritanie chez Mouhammad Rabbani, un maître coranique très connu à Médina Baye qui a appris les versets du Coran à presque tous tes fils du Cheikh Al Islam Baye Niasse.

 De retour au Sénégal, il se consacre à l’apprentissage du savoir durant plusieurs années dans les “Madjaliss’’ (école traditionnelle d’apprentissage de la littérature arabe et des sciences islamiques). Il est ensuite envoyé par son illustre père à la prestigieuse université islamique d’Al Azhar du Caire où il obtint en 1976 une Maitrise en sciences et histoires islamiques à la faculté à la faculté des lettres et sciences sociales.

En 1998, suite au rappel à Dieu de Mouhamed Nazir Ibrahima Niass, il devient directeur de l’Institut Islamique El Hadji Abdoulaye Niass. Fin analyste, conférencier hors pair, le khalife de Médina Baye est d’une courtoisie débordante. Il a hérité de son père le Tafsir du coran durant le mois béni de Ramadan. Il est un grand adepte de la lecture. Son imposante bibliothèque à la maison qu’il montre si fièrement aux visiteurs, en est la parfaite illustration.

Son commerce facile et son humilité ne l’empêchent pas d’être intransigeant quand il le faut. Alors qu’il venait juste d’être intronisé comme nouveau Khalife général de Médina Baye, Cheikh Mahi Niass annonce la couleur dès sa première prise de parole publique en tant que Khalife. S’adressant pour la première fois aux disciples de Médina Baye après avoir été désigné pour la succession du défunt Cheikh Ahmad Tidiane Ibrahima Niass, il a menacé de se démettre de sa charge spirituelle si les jeunes disciples ne font pas preuve de discipline.

“La discipline sera une sorte de contrat social entre le khalife que je suis et les jeunes disciples que vous êtes. Si vous vous illustrez de belle manière dans ce domaine, ce sera bénéfique pour tous. Au cas contraire, je risque de démissionner’’, a-t-il dit sur un ton plaisantin.

Missionnaire de la paix

 Ses missions de paix l’ont projeté au-devant de la scène. Couvert de son manteau de président en exercice de l’Union islamique africaine, Cheikh Mahi a enregistré des succès retentissants dans ses missions de retour de la paix dans la région africaine.

Le 23 mai 2022, il avait réuni les personnalités de 50 tribus à Darfour en conflit, qu’il avait exhortés de déposer les armes pour un retour de la paix. Une sollicitation fut une réussite puisque 6 jours plus tard, des autorités militaires ont annoncé la levée de l’état d’urgence imposé depuis le 25 octobre 2021, lors du coup d’Etat qui avait mis fin à la transition démocratique d’Omar El-Bachir, ancien président du Soudan.

Une nouvelle, longtemps attendue après l’échec de plusieurs médiateurs, est considérée comme une consolation pour le pays, l’Afrique et le monde entier.

Dans ses perspectives, Cheikh Mahi Niass envisage le projet de réécriture la fayda tidiane. Sur cette lancée, le patriarche de Médina Baye envisage un grand projet agricole nommé ‘’Toolu baye’’ pour guider les disciples à un retour vers la terre. Il a mis en place un fonds Médina Baye, un projet piloté à Cheikh Mahi Cissé, qui vise la modernisation de la cité en la dotant d’infrastructures sociales de base.

Sa dimension intellectuelle et sociale a propulsé Cheikh Mahi Niass au-devant de la scène internationale.

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