Après le gaz et le pétrole, le Sénégal va produire du vin

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Abdoulaye Ndiaye, 42 ans, chef de culture, nous attend avec le sourire. Derrière lui, 7 500 ceps chargés de raisins. Mais il y a des manques. « C’est à cause des termites et des rats palmistes », explique Abdoulaye. Les premiers rongent les racines, les seconds sectionnent les tuyaux d’irrigation.

Les rats palmistes sectionnent les tuyaux. | ANTOINE HERVÉ

Les parades ? « Fumier, anti-termite et abreuvoirs en bout de champ. » Autres ennemis : les singes et les oiseaux. Provenant de la réserve voisine de Bandia, les primates « vendangent avant nous », rigole le Sénégalais. Pour les effrayer, des gardiens tapent sur des bidons. Des filets protègent aussi la vigne.

Des notes de fruits rouges et de cannelle
Le climat chaud et sec de l’Afrique subsaharienne ne se prête guère à la production de raisins. Mais qu’importe ! L’ex-assureur Philippe Franchois, 69 ans, à la tête de l’exploitation, a décidé de consacrer sa retraite à tenter de cultiver la vigne au Sénégal, où il est né. Là où il fait 35 °C l’été, jamais moins de 12 °C l’hiver, et avec peu d’eau.

Le Clos des baobabs est le seul vignoble du Sénégal. 

Reste que ce n’est pas tant la chaleur qui contrarie la vigne ici, mais le manque de froid. « L’absence de dormance empêche la floraison et la fructification, explique l’ancien assureur. C’est pour cela qu’il n’y a pas de pommiers ou de poiriers ici. » Sauf que, prouesse technique ou miracle de la nature, un cépage, sur une dizaine testée, a réussi à fructifier à Nguékhokh : le grenache. Qui plus est, résistant à la sécheresse. Résultat : une vendange bien fournie, fin mai. Du vin rouge qui « s’apparente à un côtes-de-provence », dit Philippe. Certes, le nectar titre 14 degrés, soleil oblige. Mais le vin est « fin et léger en tanin, avec des notes de fruits rouges et de cannelle », complète l’œnologue Samuel Alexandre.

 

Aprés le gaz et le pétrole, le Sénégal va produire du vin

« Pas de traitement »
Paradoxalement, le climat subsaharien a aussi ses avantages : « Il n’y a pas d’humidité, donc pas de mildiou ni d’oïdium ici (des parasites), donc pas de traitement », se réjouit Philippe. Juste « un acaricide contre les acariens », complète Abdoulaye. Mais pas d’herbicide. Mamadou, l’ouvrier sénégalais, s’active à la bêche pour désherber entre les ceps. Son salaire ? « Les ouvriers et les vendangeurs sont payés à la journée, entre 3 000 et 4 000 francs CFA (4,5 à 6 €) », s’exécute Philippe. Un salaire habituel ici. Pas sûr que Mamadou puisse s’offrir une bouteille de Clos du Baobab. Elle est vendue 25 000 francs à des cavistes et des particuliers de la région.
Philippe réfléchit déjà à l’avenir : « Agrandir le vignoble, trouver un second cépage résistant, vendre en Côte d’Ivoire et développer l’œnotourisme », détaille le néo-viticulteur. Abdoulaye peut déjà acheter d’autres bidons pour effrayer les primates.

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