A la découverte du Palais de feu Djily Mbaye : Le cossu repaire du défunt milliardaire lougatois

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Construit il y a plus de trente ans par le défunt milliardaire, le Palais Djily Mbaye est la plus grande attraction à Louga. L’Observateur est allé à la découverte de ce joyau qui se meurt sous le poids des années.

C’est une matinée de rencard avec le luxe. Le lucre aussi. Huit heures du matin dans le paisible quartier Bagdad, commune de Louga, à 203 kilomètres de Dakar. Le soleil est déjà debout, mais le coin dort encore. La fraîcheur matinale ne s’est pas tout à fait estompée. Sur le long des deux routes qui traversent ce cossu repaire lougatois, se dresse une bâtisse imposante au carrelage beige marbré. Plantée à droite de la route nationale, en plein cœur de la rue «Sans soleil», sa façade s’étend sur plus de trois cents mètres. Bienvenu au Palais du défunt milliardaire Djily Mbaye.«Des meubles Louis XIV et Louis XVI»

En cette frisquette matinée lougatoise, la porte principale est grandement ouverte pour les besoins d’un récital de Coran. Mais, il faut passer par un bâtiment de plus de trois mètres de hauteur pour pénétrer à l’intérieur du Palais qui s’ouvre sur une route goudronnée tenaillée à gauche par les deux chambres qui font office de salle d’attente et à droite, par le poste de garde. Cinquante mètres plus loin, se dresse le portail du Palais qui offre un décor d’Orient avec ses palmiers plantés de part et d’autre comme pour accueillir les visiteurs. L’image renvoie à l’entrée du Palais présidentiel sénégalais. Dans les moindres détails, mais sans les gardes rouges. Et quelques mètres après la grille, il y a un bâtiment en marbre gris. «C’est le petit palais», explique notre guide. A droite, il y a une mosquée. Et à l’arrière de la mosquée : les mausolées de Djily Mbaye, de son frère Serigne Sam Mbaye et de sa femme Aminata Sourang.»

 

feu Baye Djily Mbaye en compagnie de feue Adja Aminta Sourang accueilant le défunt président gabonnais Omar Bongo Ondimba.
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Construit en 1975 pour un coût global d’environ «5 milliards FCFA», selon le communicateur traditionnel, Youssou Mbargane, le petit palais a servi, pendant 5 ans, de logis au grand milliardaire qui, en 1980, a entamé la construction du grand palais au prix fort de 11 milliards de FCFA. «Pour la réalisation de ce chef d’œuvre, Djily Mbaye avait fait venir de grands entrepreneurs sénégalais à Louga. Mais pour toute la décoration, ce sont des Marocains qui s’enfermaient pour travailler, car ils ne voulaient pas que les Sénégalais voient comment ils travaillaient. Mais, très perspicaces, les Sénégalais sont parvenus à savoir comment ils travaillaient», explique Youssou Mbargane. L’objectif du visionnaire Djily Mbaye, toujours selon le communicateur traditionnel, «c’était de faire en sorte que les émirs du Golf viennent passer leurs vacances à Louga. Et il avait estimé le gain du séjour d’un émir à Louga à 600 millions de FCFA pour la ville, à l’époque. Et il voulait les faire venir par intermittence».

Milliardaire au grand flair de businessman, feu Djily Mbaye qui était très porté sur la religion islamique et, surtout, sur les enseignements de Serigne Touba, n’avait pas construit son somptueux grand palais, comme le soutient la chronique, pour du tape-à-l’œil. Bien au contraire. Il voulait, à travers cette somptueuse infrastructure, participer au développement de sa ville et de son pays. «C’est le Sénégal qui est mon pays préféré dans le monde au Sénégal, c’est Louga l’endroit que j’aime le plus», aimait-il à répéter à ses interlocuteurs. Djily Mbaye voulait faire de Louga le poumon économique du Sénégal. Ville centre de par sa position géographique, il voulait que Louga soit à la croisé des chemins économiques et le carrefour du business sénégalais. «Pour cela, Djily (Mbaye) avait un projet de construction de l’autoroute Louga-Saint-Louis, l’internationalisation de l’aéroport de Saint-Louis, la construction d’un terrain de Golf à Louga et le goudronnage de la route Louga-Potou pour l’accès à la mer », se souvient le vice-président du réseau des communicateurs traditionnels de Louga. Et Youssou Mbargane d’ajouter : «Il voulait même que le premier sommet de l’Organisation de la conférence islamique (Oci) (en 1991) se tienne à Louga. Ils ont évoqué à l’époque des problèmes de sécurité. Alors que le roi Hassane II du Maroc avait promis de lui offrir 40 villas présidentielles. Mais le sommet de l’Oci s’est tenu à Dakar.»

Aujourd’hui, malgré sa vétusté naissante, le Palais Djily Mbaye garde encore tout son luxe et ravit même la vedette aux hôtels, auberges et campement lougatois. Toutes les autorités, ou presque, qui séjournent à Louga, passent la nuit au Palais. Et cela, depuis toujours. Youssou Mbargane : «Les Présidents Abdou Diouf (Sénégal), Houphouët-Boigny (Côte d’Ivoire), Mobutu Sese Seko (Zaïre, nouvelle Rdc), Oumar Bongo (Gabon), à qui il parlait au téléphone chaque jour que Dieu fait, de même que le Roi Fahd Ben Abdelaziz d’Arabie Saoudite, chacun de ses illustres personnalités y avait sa suite spéciale. Ce qui faisait dire à certains que le Palais Djily Mbaye était le palais des présidents.»

Malgré toute sa puissance économique et son riche carnet d’adresse, le milliardaire Djily Mbaye aimait se faire petit. Il passait inaperçu dans son vaste et luxueux domaine où il vivait avec ses (2) épouses, à l’exception de la première, Aminata Sourang, femme vertueuse, qui avait tenu à vivre avec sa mère à la maison familiale. «Et les jours de Maouloud (Gamou), tous les Sénégalais ralliaient Louga pour bénéficier de ses grâces. Parce que le lendemain matin, il se mettait dans un box au palais où il distribuait de l’argent pendant deux jours à un millier de personnes qui faisaient la queue sur presque un kilomètre», explique un témoin trouvé dans le palais.

«Djily Mbaye était un phénomène de la nature que Dieu avait doté d’un savoir-faire et d’un savoir-être, de tout ce qu’un homme de Dieu devait avoir. En plus de cela, il y avait sa fortune, qu’il utilisait pour aider les gens», ajoute Mbargane. Jusqu’à sa mort à 64 ans en 1991, le sage de Louga n’a jamais pris le melon. La politique, peu pour lui. «Il n’avait pas l’ambition d’être maire de Louga, encore moins de Président du Sénégal. Il est devenu riche un peu avant 40 ans. Il a été tailleur, vendeur de montre, marchand ambulant à Conakry puis à Dakar. Il pouvait prédire l’avenir. Certaines personnes qui ont eu à vivre avec lui soutiennent que Djily n’était pas une personne ordinaire.» Et son somptueux palais de Louga en est la preuve vivante.

SOURCE : L’OBSEVATEUR LATIR MANE (Envoyé spécial à Louga)

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