Sénégal: l’hippopotame de la discorde [Chronique]

Un chasseur pourrait être condamné pour avoir abattu, au Sénégal, un hippopotame protégé. Mais l’animal ne constituait-il pas une menace ? La responsabilité de l’abattage n’est-elle pas politique ? Les questions sont soulevées…

Levée de boucliers, dans la région sénégalaise de Kédougou, après la mise à mort « youtubée » d’un hippopotame dans le chef-lieu régional de l’extrême sud-est du pays. Rapidement après les faits, sur les antennes de iRadio, l’ancien ministre de l’Environnement Haïdar el Ali rappelle que le « cheval de rivière » abattu fait partie des espèces « intégralement protégées ». Il explique que ces animaux « transportent les pains des arbres » et disséminent « les graines » pour le plus grand bien de l’écosystème.

La polémique soulève deux questions : celle de la présumée nécessité de l’abattage et celle du niveau de responsabilité.

Sur le premier point, sans surprise, l’indignation semble d’autant plus forte qu’elle est éloignée de la ville de Kédougou. Pour le Kédevain visité par l’hippopotame comme pour le Pyrénéen confronté à la réintroduction de l’ours, la liberté de l’animal trapu s’arrête là où commence celle des villageois. De ce point de vue, la vidéo virale, si elle choque par les giclées de sang, montre également la crainte perceptible d’habitants fuyant, dans les ruelles, le mammifère échappé de la mare de Dalaba.

Légitime défense ?
Le commandant Moussa Ndour, responsable de la Zone d’intérêt cynégétiques (ZIC) de la Falémé et chef de la faune de Kédougou, confirme que l’animal devait être « neutralisé ». Si le colosse a perdu la vie lors de son immobilisation, ce serait uniquement à cause du manque de moyens neutralisants des services de gestion de la faune. Sous cet angle, la polémique pourrait être éteinte par l’évocation d’une sorte de légitime défense ponctuelle.

La deuxième question à laquelle ne répond pas le commandant Ndour est celle du commanditaire de la mise à mort. L’exécutant est connu : le chasseur François Uart, directeur du campement le Relais, qui a neutralisé l’amphibien de 5 balles de calibre

375 dans la tête. Selon le code de la protection de la faune, le bourreau ou héros – c’est selon – est passible d’une peine de 1 à 5 ans d’emprisonnement, pour avoir agi sans permis scientifique. L’avocat maître Bamba Cissé réclame une enquête pour situer d’éventuelles responsabilités politiques…

Par Damien Glez
Dessinateur-éditorialiste franco-burkinabè

Source: Jeune Afrique

camou camara

Recent Posts

[Interview] « Si Sonko suit les conseils de son gourou idéologique Mélenchon, le Sénégal deviendra le Venezuela » Yoro Dia

Grand entretien avec le Dr Yoro Dia, politologue, ancien ministre, porte-parole de la Présidence de la…

2 heures ago

Trafic de cocaïne : pourquoi le fils de Idrissa Seck a été arrêté dans une clinique

L’affaire fait grand bruit. Abdoulaye Seck, fils de l’ancien Premier ministre Idrissa Seck, fait partie…

4 heures ago

Affaire Lac de Guiers 2 : Sadio Mané débloque 10 millions F CFA pour…

Bonne nouvelle pour Lac de Guiers 2. Après avoir bénéficié d’un retour de parquet jeudi,…

4 heures ago

Répressions sous Macky : Sonko accuse Macron d’avoir « accueilli et félicité » son homologue au pire moment…

  Lors d’une conférence coanimée par Ousmane Sonko et Jean Luc Mélenchon, ce jeudi 16…

4 heures ago

Trafic de cocaïne : pourquoi le fils de Idrissa Seck a été arrêté dans une clinique

L’affaire fait grand bruit. Abdoulaye Seck, fils de l’ancien Premier ministre Idrissa Seck, fait partie…

5 heures ago

Plan décennal de lutte contre les inondations : L’ultume décision du Premier ministre sur les 717 milliards FCfa investis

Les inondations sont un véritable casse-tête au Sénégal. Il faut des solutions durables et non…

5 heures ago