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Pr Fatou Sow Sarr : «Pourquoi nous sommes prêtes à porter la candidature de Soham Wardini…»

Directrice de l’Institut Genre et Famille, sociologue et féministe engagée, Pr Fatou Sow Sarr revient dans cet entretien avec L’Observateur sur le soutien du Caucus des femmes leaders à la maire sortante de la Ville de Dakar, Soham Wardini. Chercheure à l’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan) et présidente du Réseau africain pour le soutien à l’entrepreneuriat féminin (Rasef), Fatou Sow Sarr se réjouit du nombre important de femmes à la conquête des collectivités locales le 23 janvier 2022.

Vous êtes la présidente du Caucus des femmes leaders. L’actualité est marquée par la préparation des élections locales du 23 janvier prochain, comment analysez-vous toute cette effervescence qu’il y a autour ?
C’est très intéressant. On voit l’arrivée massive de nouveaux acteurs qui revendiquent leur pleine implication, c’est-à-dire les femmes et les jeunes. Ils n’ont pas toujours les moyens de leurs ambitions, mais c’est un signe important, annonciateur de rupture. Quels que soient les résultats, que les femmes et les jeunes soient ou non têtes de listes, les hommes politiques comprendront que pour les années à venir, ils devront intégrer cette donne ou périr.

Comment voyez-vous l’engagement et la participation des femmes dans ces joutes électorales ?
Les femmes, à travers le Caucus des Femmes Leaders, depuis octobre 2020, à

travers le programme WPP, a mis en place un programme d’études, de formation, de coaching, de sensibilisation des femmes pour une implication pleine pour les élections et de plaidoyer en direction des leaders pour augmenter le nombre dérisoire de femmes maires (soit 15 sur 557). Les résultats sont probants, nous avons, à ce jour, 106 femmes qui sont candidates à la candidature, donc un véritable éveil de conscience pour briguer la tête des collectivités locales. Elles se battent toutes au sein des coalitions, même si elles rencontrent une forte résistance des hommes. Et la marche pacifique du 24 octobre voulait rappeler aux responsables de coalitions leur engagement, si tant est qu’ils ont une parole d’honneur.

Le Caucus a décidé de soutenir la candidature de Mme Soham Wardini à la Ville de Dakar, pourquoi ?
Parce que pour la première fois, nous avons une femme à la tête de la capitale du Sénégal, et que toutes les institutions sont quasiment entre les mains des hommes.

N’est-ce pas un choix guidé uniquement par la défense de la condition féminine ?
Mme Wardini a fait ses preuves. Elle n’est impliquée dans aucun scandale, ni foncier ni financier. Elle a mis en place des programmes d’accompagnement appréciés par les populations. Pourquoi décider de reconduire les anciens maires et pas elle ?

Sa candidature n’est pas encore validée par sa coalition. Est-ce que le Caucus est prêt à porter la candidature de Mme Wardini au cas où elle ne serait pas investie par la coalition Yewi Askan Wi à Dakar?
Oui bien sûr, car elle est devenue un symbole dans la lutte des femmes pour la conquête du pouvoir. Elle dirige la Ville de Dakar avec beaucoup de rigueur et d’éthique.

A votre avis, pourquoi le leadership féminin a du mal à s’imposer dans la politique au Sénégal ?
C’est d’abord notre histoire coloniale, et ensuite le manque de vision

et de perspective des hommes qui nous dirigent. La colonisation a consacré le recul de la femme, car après avoir conquis un pays dirigé par une femme, le Waloo de Ndaté Yalla Mbodj, en 1855, il a décrété que les femmes ne seront ni électrices ni éligibles. Il a fallu, en 1945, la détermination et la lucidité de Ndaté Yalla Fall et de Soukeyna Konaré (deux adversaires politiques) qui ont décidé d’unir leurs forces pour mener la bataille contre le colonisateur. Elles ont eu gain de cause. Les femmes ont été impliquées dans toutes les luttes contre le colonisateur. Elles ont suppléé les hommes là où ils étaient traqués. Les indépendances obtenues, ces derniers les ont exclues de tout. C’est contre cette injustice que toutes les femmes et tous les hommes lucides doivent se battre. Le colonisateur a limité l’accès des femmes à l’éducation et à l’administration, or, si les hommes contrôlent l’espace politique, ils le doivent aux positions qu’ils occupent dans l’administration qui leur donne des possibilités d’avoir une clientèle politique. Ils peuvent recruter et financer des militants, ils disposent de voitures et de carburant pour aller à la rencontre de leur base ou battre campagne.

Aujourd’hui, est-ce que la loi sur la parité a apporté des avancées significatives ?
Bien sûr, le scrutin de liste a permis l’accès massif des femmes à l’Assemblée nationale (43%) et aux collectivités locales (47%). Mais pour accéder aux instances de décision, les femmes doivent dépasser la stratégie de revendication des droits pour celle de la conquête du pouvoir.

IGFM

camou camara

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