Le Groupe consultatif 2018, point d’orgue d’un débat économique animé

L’année 2018 qui s’achève, laissera le souvenir d’une année record en termes de mobilisation de ressources pour le Plan Sénégal émergent (PSE), avec la levée, le 17 décembre dernier, à Paris, de 7356 milliards de francs CFA pour son plan d’actions prioritaires (PAP) 2019-2023.

Ce jour-là, le Sénégal réussissait à réunir tout le gotha des bailleurs internationaux au siège de la Banque mondiale dans la capitale française. 

Outre l’institution hôte de la réunion, le Fonds monétaire international (FMI), la Banque africaine de développement (BAD), le Fonds saoudien, l’Union européenne (UE), la France, les Etats-Unis, le Canada, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la Chine, etc. ont tous tenu à être présents.
 
A cette occasion, les représentants des partenaires techniques et financiers (PTF) ont tous réaffirmé leur volonté d’accompagner le Sénégal à poursuivre la mise en œuvre du PSE, dont la première phase est considérée comme une réussite.
 
Les uns et les autres se sont montrés enthousiastes, se disant convaincus de la pertinence de la vision déclinée à travers ce référentiel des politiques publiques, dont la première phase a été déroulée sur la période 2014-2018.
 
Après avoir soutenu le PAP 20114-2018 du PSE, la BAD est la première à casser littéralement la tirelire en annonçant 2 milliards de dollars. 
 
La France ne se fera pas prier par l’intermédiaire de son ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, Bruno Le Maire pour annoncer des engagements à hauteur de 1,

5 milliard d’euros.

Et c’est la Banque mondiale qui crèvera le plafond, en promettant 3,5 milliards de dollars. C’est dire que les compteurs se sont vite affolés, avec, au finish, 7356 milliards récoltés, alors que le besoin de financement n’était que de 2850 milliards de francs CFA.

UNE CROISSANCE PROJETÉE DE 9,1% SUR LA PÉRIODE 2019-2023

En 2014, les partenaires techniques et financiers avaient pris des engagements nouveaux de l’ordre de 3.729 milliards de francs CFA, portant à 5.785 milliards CFA le montant global de la phase 1 du PSE, contre 14 098 milliards pour la seconde phase.
 
Le PAP 2 vise à assurer une croissance de 9, 1% sur la période 2019-2023, avec “un déficit budgétaire maintenu sous le seuil des 3% du PIB dès 2019 et une pression fiscale à 20 en 2023”.
 
L’ambition du plan se lit aussi à travers les indicateurs sociaux. A terme, les autorités sénégalaises veulent porter l’indice de développement humain (IDH) de 0, 51 à 0, 53 et le taux de pauvreté de 35, 6 % à 29, 9%. 
 
Pour l’électrification, la barre est encore plus haute, l’objectif étant d’atteindre un taux d’accès à l’électricité de 100% contre 61, 7% actuellement.
 
Ainsi, en milieu rural, ce taux devrait passer de 37, 2 % à 100 %. Pour le taux brut de scolarisation, un taux de 96,3 % est visé, contre 87, 3 % aujourd’hui. 
 
Pour parvenir à ces résultats, pas moins de 700 projets devraient voir le jour avec “une priorisation opérée sur la base de 11 critères”, selon le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan.
 
Le succès de ce Groupe consultatif pour le Sénégal ne doit cependant pas faire oublier “la polémique” de plusieurs mois sur les “tensions de trésorie” ou difficultés budgétaires et le niveau d’endettement du Sénégal.
 
Cette question était devenue le cheval de bataille de l’opposition, une manière subtile de laisser penser que les deniers de l’Etat sont mal gérés. Mais plus sérieusement, le gouvernement a dû s’expliquer avec l’intervention de la Banque mondiale et le Fonds monétaire international dont les avis ont semblé aller dans le sens de ceux qui s’inquiétaient de cette situation, et pas seulement des opposants.
 
L’ÉTERNEL DÉBAT SUR LE NIVEAU D’ENDETTEMENT 

La réponse du ministre de l’Economie, des Finances et du Plan Amadou Bâ a été de dire qu’il s’agit de “difficultés passagères voulues, souhaitées” par le gouvernement, du fait de sa politique sociale consistant à faire des ajustements sur les dépenses, pour ne pas augmenter le prix de l’électricité et des produits pétroliers, par exemple.
 
Mais le débat économique de 2018 ne pouvait se limiter à cela, certains acteurs politiques ou économiques ne cessant de s’alarmer du niveau d’endettement du Sénégal, encore plus après les résultats du Groupe consultatif pour le Sénégal 2018, qui a vu le pays engranger de nouveaux financements.
 
Dans un rapport datant du premier semestre, la Banque mondiale, évoquant le cas de certains pays, notait que “la dette publique élevée, la dépréciation des monnaies nationales et la hausse des taux d’intérêt pourraient compromettre la capacité de certains pays africains à assurer le service de la dette”, les financements non-concessionnels représentant une part importante de la dette publique.
 
Dans un entretien avec les médias sénégalais datant de mars dernier, la représentante-résidente du Fonds monétaire internationale (FMI) Chemille Sancak, notait pour sa part que le risque d’endettement du Sénégal demeurait “très faible”, avant d’appeler le gouvernement à gérer sa dette avec “prudence”.
 
“Jusqu’à ce jour, le risque d’endettement du Sénégal reste faible. Tout de même, il est important que le gouvernement continue à gérer sa dette avec prudence”, déclarait-elle.
 
“Pour que le Sénégal conserve son faible risque de surendettement, il faudra traiter les problèmes structurels liés au besoin de financement global du secteur public, lequel n’est pas entièrement reflété par le déficit budgétaire global”, suggérait Cemille Sancak.

Cela ne semble pas apaiser ce débat, spécialement après les finacements récoltés à Paris, qui paraissent avoir plutôt accentué les inquiétudes de certains économistes sur ce plan. 

Aminata Ndiaye

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