Le chant des sirènes de la rupture face à l’imminence de la déception – Par Aliou Top

Le Sénégal, terre de Teranga et de résilience, a vibré comme jamais ces dernières années. Un peuple, corps et âme, s’est levé, a bravé l’adversité, sacrifié des vies et enduré l’indicible pour un idéal clair : la rupture. L’avènement du duo Diomaye-Sonko à la tête de l’État n’était pas qu’une alternance politique, c’était l’incarnation d’un espoir ardent, la promesse d’un nouveau chapitre où les vieilles pratiques seraient bannies et la dignité retrouvée. Mais à l’heure où les premières ombres s’allongent sur ce mandat naissant, un malaise grandit : le spectre du « semblant de rupture » menace-t-il déjà de dissiper l’ardeur populaire ?

Le Coût de l’Espoir : Une Victoire Fruit de Sacrifices Inouïs

Il est impératif de se rappeler le prix payé pour ce changement. Des jeunes sont tombés, des familles ont été brisées, des milliers de Sénégalais ont connu l’arbitraire et la répression. Ce n’est pas une transition classique qui a porté le Pastef au pouvoir, mais un véritable soulèvement populaire, une soif inextinguible de justice, de transparence et de souveraineté. Le mandat donné à Bassirou Diomaye Faye est historique par son contexte, mais aussi par les attentes qu’il génère. Le peuple s’est battu pour une rupture systémique, pas pour un simple toilettage de façade.

La Souveraineté : Pilier de la Promesse Sonkoienne

Au cœur de cette promesse de rupture, le concept de souveraineté, cher à Ousmane Sonko, résonne avec une force particulière. Sonko n’a eu de cesse de marteler l’urgence pour le Sénégal de reprendre le contrôle de ses richesses, de ses décisions, de son destin. Il a courageusement dénoncé les accords léonins, l’emprise étrangère sur nos ressources naturelles, la tutelle monétaire. C’est cette vision, cette ambition de dignité retrouvée et de pleine maîtrise de notre indépendance, qui a fédéré les énergies et soulevé les foules. La rupture, dans l’esprit populaire, c’est d’abord la matérialisation de cette souveraineté pleine et entière, économique, financière, énergétique. C’est le passage des paroles aux actes concrets sur ces questions vitales.

L’Épreuve de l’Action : Des Attentes Immenses face aux Premiers Doutes

Aujourd’hui, l’heure est à la matérialisation de cet idéal. Si le discours de rupture a été magistral, l’exécution sur le terrain doit suivre avec la même audace et la même détermination. Or, les premières critiques et les signaux d’alerte commencent à poindre. La nomination de certains profils, la lenteur perçue sur des dossiers clés, ou encore des déclarations maladroites, sèment les graines du doute. Le peuple, qui a fait preuve d’une patience extraordinaire dans la lutte, attend désormais des preuves tangibles de cette rupture tant promise.

Le véritable défi n’est pas de conserver le pouvoir, mais de ne pas trahir l’immense confiance placée en eux. Si ceux qui ont été mandatés pour incarner ce changement radical, ceux qui ont porté la voix de cette souveraineté retrouvée, se sentent incapables de traduire cet engagement en actions concrètes et visibles, il est de leur devoir de le dire. Car le peuple sénégalais, qui a prouvé sa capacité à se battre pour un idéal, saura aussi tirer les conclusions qui s’imposent si le chemin s’avère n’être qu’un « semblant de rupture ». L’histoire ne pardonnera pas la déception d’un espoir si chèrement acquis. La balle est dans le camp de ceux qui, aujourd’hui, détiennent les rênes du pouvoir. Le temps des paroles doit céder la place à celui des actes, avec l’audace et la transparence que le peuple exige et mérite.