L’ancien président de la République du Sénégal, Macky Sall, rompt le silence et entre de plain-pied dans la controverse nationale sur la supposée « dette cachée » accumulée durant son dernier mandat. Dans une manœuvre à la fois politique et juridique, il a lancé, ce mardi 7 octobre, une offensive coordonnée pour contester ce qu’il considère comme une entreprise de dénigrement politique fondée sur des accusations infondées de manipulation des chiffres de la dette publique.
Selon des informations , Macky Sall a officiellement saisi deux institutions clés de la République : le ministère des Finances, dirigé par Cheikh Diba, et la Cour des comptes, présidée par Mamadou Faye. Objectif : réclamer l’accès intégral au rapport de l’Inspection générale des finances (IGF), document central qui a servi de base à l’audit de la dette publique couvrant la période 2019-2024.
Une démarche offensive et structurée
L’ancien chef de l’État ne laisse rien au hasard. Il s’est entouré de conseils de poids : plusieurs cabinets d’avocats internationaux, dont le pilotage est confié à Me Pierre-Olivier Sur, ténor du barreau parisien et ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats de Paris. À leurs côtés, des experts financiers de renom ont été mobilisés pour préparer une contre-analyse technique des audits ayant conduit à la révélation d’un écart suspecté entre la dette officiellement déclarée et celle réellement contractée.
Dans les courriers adressés à Cheikh Diba et Mamadou Faye, Macky Sall formule une demande explicite : la transmission du rapport de l’IGF, jusqu’ici tenu confidentiel. Il affirme que ni lui ni les membres de son ancien gouvernement n’ont eu accès à ce document, pourtant utilisé pour tirer des conclusions sévères sur la gestion des finances publiques sous son magistère.
L’exigence d’un débat contradictoire
Pour l’ex-président, cette absence de transparence constitue une violation du principe fondamental du contradictoire. Dans sa correspondance, il dénonce une procédure à sens unique qui, selon lui, porte atteinte à son droit de réponse et à celui de tous les responsables de son ancien régime.
« Un rapport non publié, non notifié, ne peut fonder des accusations sans remettre en cause les principes élémentaires de l’État de droit », écrit-il en substance, selon des extraits relayés par L’Observateur. Il interpelle également la Cour des comptes sur la régularité de la procédure d’audit, demandant que le processus soit certifié comme conforme aux standards internationaux en matière de transparence et d’équité.
Un enjeu politique majeur
Derrière cette démarche juridique, c’est tout l’enjeu politique de la succession de Macky Sall qui se joue. Depuis l’arrivée au pouvoir du président Bassirou Diomaye Faye, soutenu par Ousmane Sonko, l’État s’est engagé dans un vaste chantier d’audit de la gouvernance passée, promettant de faire toute la lumière sur la gestion des deniers publics.
La question de la « dette cachée » est ainsi devenue un marqueur symbolique de la rupture annoncée par le nouveau pouvoir. Mais pour Macky Sall, il s’agit désormais de défendre son héritage et, surtout, de contenir ce qui pourrait devenir un feuilleton judiciaire à fort potentiel de déstabilisation politique.
Vers une judiciarisation du débat ?
En confiant le dossier à des cabinets internationaux, Macky Sall semble préparer une stratégie de défense sur plusieurs fronts : national, bien sûr, mais aussi international. Une éventuelle procédure d’arbitrage ou de recours devant des instances extérieures n’est pas à exclure, notamment si la communication des documents lui est refusée ou si des accusations formelles venaient à être portées contre lui ou ses proches collaborateurs.
Ce nouvel épisode marque donc un tournant : celui d’un bras de fer institutionnel entre un ancien chef d’État, soucieux de défendre son honneur et son bilan, et un pouvoir actuel décidé à imprimer sa marque sur la reddition des comptes. La suite pourrait se jouer aussi bien dans les bureaux feutrés des juridictions sénégalaises que sur les tribunes de l’opinion publique.
Une chose est sûre : le dossier de la « dette cachée » n’a pas fini de faire parler de lui.
Mariata beye pour sunugal 24