L’Etat doit organiser des tests massifs pour éviter un confinement général aux risques sociaux et économiques incertains.
Le FRAPP a demandé aujourd’hui 21 avril 2020 à 12h15 à la Cour suprême d’enjoindre à l’Etat du Sénégal, à travers son Ministre en charge de la santé et de l’action sociale, de procéder, par un dispositif adapté, à un test de dépistage massif des populations.
À 11h45 aujourd’hui, le FRAPP l’avait signifié à l’agent judiciaire de l’État.
Voici la requête déposée à la Cour suprême
FRAPP/FRANCE DEGAGE Dakar, le 21/04/2020
CONOCHAP N°195-Scat Urban
Cité conachap Grand Yoff Mandataire
Guy Marius SAGNA,
Le Mouvement Front pour une Révolution Anti-impérialiste Populaire et Panafricaine (FRAPP/FRANCE DEGAGE), ayant son siège à Dakar, CONOCHAP, N°195-Scat Urban, agissant es-nom et es-qualité de son mandataire, Monsieur Guy Marius SAGNA, Citoyen Sénégalais, membre du FRAPP, mandaté aussi par les citoyens ci-après élisant tous domicile au siège du mouvement FRAPP/FRANCE DEGAGE, CONOCHAP, N°195-Scat Urban, Dakar ;
:
1- Alioune Badara Mboup, membre du FRAPP
2- Malick Diallo Biaye, membre du FRAPP
3- Alioune Ibnou Abatalib Sow, membre du FRAPP
4- Fatima Mbengue, membre du FRAPP
Ensemble désignés ci-après par le terme « Les requérants » ;
A Monsieur le Président de la Cour Suprême du Sénégal, juge des référés
Objet : REQUETE EN RÉFÉRÉ MESURES-UTILES (en application de l’article 86 de la loi organique n° 2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême) aux fins d’enjoindre à l’Etat du Sénégal de procéder à un test de dépistage massif des populations, de sorte que les défaillances constatées dans la circulation du virus Covid-19, susceptibles d’affecter la sécurité et la santé des citoyens, soient éliminées, de prendre toutes les mesures propres à faire respecter l’égal accès de toutes les personnes au test de dépistage ; d’évaluer de manière régulière et contrôler le fonctionnement des dispositifs de tests existants, de dégager les moyens nécessaires pour être utilisés à tout moment, d’ordonner toutes mesures utiles en application de l’article 86 de la loi sur la Cour suprême.
I- Faits
En décembre 2019, à Wuhan en Chine, premier foyer de la pandémie, surgit une nouvelle maladie fortement contagieuse, dénommée COVID 19 ;
L’émergence d’un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou covid-19, de caractère pathogène est particulièrement contagieux. L’humanité ne sera vraiment informée que le 24 Janvier 2020 alors que le virus s’était déjà emparé de la Chine ;
Sa propagation a été qualifiée d’urgence de santé publique internationale par l’Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020 ;
Alors que la maladie n’a pas encore de vaccin ni de traitement universellement accepté, depuis lors et chaque jour, non seulement plusieurs pays sont touchés, mais on dénombre de milliers de morts dans le monde entier ;
Alors que l’Etat du Sénégal, par la voix du Ministre de la Santé et de l’action sociale rassurait qu’il avait pris toutes les dispositions et qu’il était prêt à faire face à la pandémie ;
Le 02 mars 2020, le Sénégal déclarait son premier cas de COVID-19, et, devenait ainsi le quatrième pays africain à confirmer le virus. Depuis cette date, dans la stratégie adoptée par le Sénégal, l’accent est mis sur l’identification des cas positifs, le suivi des contacts, notamment ceux à haut risque ;
Le 21 mars 2020, cette stratégie montrait ses limites. Le Sénégal enregistrait ses trois (03) premiers cas issus de la transmission communautaire. Pour la première fois dans son point quotidien de situation sur le Covid-19 au Sénégal, le ministère de la Santé évoquait des cas ‘’issus de la transmission communautaire’’, ce qui laisse entendre que le virus se propage au sein d’une communauté d’une personne à une autre ;
Le 23 mars 2020, le décret n° 2020-830 du 23 mars 2020 proclame l’état d’urgence sur le territoire national ;
Le 25 mars 2020, le ministre des infrastructures, des transports terrestres et du désenclavement a pris l’arrêté n° 008231 fixant les mesures de restriction prises dans le secteur des transports terrestres, dans le cadre de la lutte contre le Covid 19 ;
Le 03 avril 2020, le décret n° 2020-925 du 3 avril 2020 confirme « les proportions inquiétantes de la pandémie » et proroge l’état d’urgence,
II- Sur la recevabilité de la requête
1-Sur l’intérêt à agir
Considérant que les requérants citoyens sénégalais, élisant tous domicile à Dakar, devenue épicentre de l’épidémie, qui attaquent l’Etat du Sénégal pour carence, justifient d’un intérêt à agir pour introduire la présente requête dont la recevabilité n’est pas subordonnée à l’existence d’une décision administrative préalable ;
Considérant que la Constitution en son article 7 précise que « La personne humaine est sacrée. Elle est inviolable. L’Etat a l’obligation de la respecter et de la protéger. Tout individu a droit à la vie, à la liberté, à la sécurité, au libre développement de sa personnalité » ;
Considérant que le Sénégal a affirmé le droit à la santé à travers l’article 8 de la Constitution qui dispose que «La République du Sénégal garantit à tous les citoyens le droit à la santé » ;
Considérant que la charte africaine des droits de l’homme et des peuples précise en son article 16 que « Toute personne a le droit de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu’elle soit capable d’atteindre. Les Etats parties à la présente Charte s’engagent à prendre les mesures nécessaires en vue de protéger la santé de leurs populations et de leur assurer l’assistance médicale en cas de maladie » ;
Considérant que les requérants demandent à l’Etat du Sénégal d’agir dans un sens déterminé ; qu’ils ont, en tant que citoyens sénégalais, intérêt, en cette qualité, à demander à l’autorité administrative de prendre des mesures utiles à la sauvegarde de la santé des populations contre le covid-19 ;
Considérant que la qualité de citoyen : suffit à la défense des intérêts de la population, permet de demander de poursuivre toutes les améliorations de santé, donne intérêt à contester la carence de l’Etat, permet de demander aux pouvoirs publics d’user de leurs pouvoirs pour assurer le fonctionnement efficace du service public de la santé ;
Considérant que les citoyens qui contestent l’inaction de l’Etat au titre des mesures à prendre dans la lutte contre le Covid-19, maladie déclarée pandémie, justifient d’un intérêt suffisamment direct leur donnant qualité à cet effet compte tenu des inconvénients et dangers que présente pour eux la maladie en cause ;
Par conséquent, le requérants ont intérêt à agir et la requête doit être déclaré recevable.
2-Sur le bien-fondé de la requête en référé mesures utiles
Considérant que l’article 83 de la loi organique n° 2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême dispose : « Il est institué un juge des référés en matière administrative. Il statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n’est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais. Est juge des référés, le premier président de la Cour suprême ou le magistrat qu’il désigne à cet effet » ;
Considérant que l’article 86 de la même loi précise qu’ « En cas d’urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l’absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative » ;
Considérant que le présent recours n’est ni un recours pour excès de pouvoir ni même un recours contre un acte administratif à fortiori contre un acte administratif dont le champ d’application excèderait les compétences de la Cour suprême ;
Considérant que dès lors, le recours ressort nécessairement de la compétence de la Cour suprême juge de droit de ce contentieux administratif des référés ainsi qu’il est dit aux articles 83 et 86 de la loi organique n° 2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême ;
Considérant que la carence de l’Etat porte une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales : en premier lieu, le droit à la vie, garanti par l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, ainsi que le droit à la santé garanti par l’article 16 de la Charte africaine des droits de l’homme et des Peuples, le droit à la protection de la santé garanti par l’article 8 de la Constitution ainsi qu’au droit de recevoir les traitements et les soins les plus appropriés à son état de santé, le droit à la prévention et la précaution ;
Considérant que le droit à la protection de la santé est une exigence, voire un impératif de valeur constitutionnelle ;
Considérant que ceci
III-Sur l’urgence
a-Sur sa condition remplie
Considérant que la condition d’urgence est remplie, dès lors, d’une part, que le virus à l’origine de la pandémie de covid-19 est très contagieux et présente un risque de mortalité élevé et que, d’autre part, l’insuffisance quantitative des tests réalisés met en danger les médecins qui doivent assurer les soins, les patients ainsi que chaque citoyen, du moment qu’avec les cas de transmission communautaire le virus circule dans le pays ;
Considérant que c’est sur la base d’un dépistage massif que nous pourrions être amenés à accroître notre surveillance et notre contrôle sur la maladie ;
Considérant que l’urgence à dépister les populations des villes ou circulent la maladie en général et celle de Dakar en particulier, épicentre de la maladie, est devenue une nécessité ;
Considérant que l’Etat du Sénégal n’ose nier l’urgence car, c’est la même urgence qui justifie la proclamation de l’état d’urgence sur l’étendue du territoire national et sa prorogation pendant pour trois (03) mois, l’instauration d’un couvre-feu de vingt (20) heures a six (06) heures du matin, la fermeture des mosquées, la fermeture des universités, la fermeture des écoles, l’interdiction des transports inter-régions, la fermeture des frontières par le Gouvernement. La même urgence à conduit des maires, gouverneurs, préfets à fermer des marchés, des endroits publics et clos. La même urgence a rendu le port obligatoire et généralisé de masques de protection ;
Considérant que l’urgence est donc manifeste ;
b-Sur la gravité de la propagation du Covid-19 et son caractère incontrôlé
Considérant que depuis le 2 mars 2020, dans la stratégie adoptée par le Sénégal, l’accent est mis sur l’identification des cas positifs, le suivi des contacts, notamment ceux à haut risque ;
Mais Considérant que dans son rapport de présentation, le décret n° 2020-925 du 3 avril 2020 prorogeant l’état d’urgence sur l’étendue du territoire national précise que « Le décret n° 2020-830 du 23 mars 2020 avait proclamé l’état d’urgence sur le territoire national. Ce décret avait permis aux pouvoirs publics de prendre toutes les mesures tendant à restreindre les libertés publiques en vue d’endiguer le Covid-19 et de freiner sa propagation. Cependant, malgré les mesures prises, la pandémie a pris des proportions inquiétantes nécessitant ainsi la prorogation de l’état d’urgence ». C’est pourquoi et conformément à l’article 69 de la Constitution, l’Assemblée nationale, en adoptant la loi n° 2020-13 du 02 avril 2020, a autorisé le Président de la République à proroger l’état d’urgence pour une durée de trois (3) mois » ;
Considérant qu’à la date du 22 mars 2020, la propagation du virus du Covid-19 se poursuivait sur le territoire sénégalais, mais pas de façon uniforme ;
Considérant que les foyers de contamination étaient la région de Dakar, Thiès, Diourbel, Saint-Louis, Ziguinchor ;
Considérant que neuf (09) régions semblaient encore relativement épargnées ;
Considérant que le virus ne circule plus de façon uniforme ;
Considérant que d’autres régions ont été touchées ;
Considérants que les derniers cas issus de la transmission communautaire qui ont été identifiés à ce jour, répartis majoritairement autour de quelques foyers, dont le principal dans la région de Dakar ;
Considérant qu’en faisant la carte des communes touchées par la transmission communautaire du Covid-19, le ministre de la Santé a cité Keur Massar, Diamniadio, Rufisque, Pikine, Thiaroye Gare, Yeumbeul Sud, Mbao, Médina, Gueule Tapée-Fass-Colobane, Plateau, Golf Sud, Wakhinane Nimzatt, Ndiareme limamoulaye, Yoff et Mermoz ;
Considérant que les stratégies adoptées par l’Etat du Sénégal dans cette période présentent une immunité collective insuffisante ;
Considérant que la stratégie du Gouvernement pouvait s’expliquer au premier stade de propagation du virus sans cas de transmission communautaire ;
Mais considérant que l’Etat du Sénégal doit aller beaucoup plus loin en dépistant massivement ;
Considérant que le ministre de la Santé a annoncé une montée rapide des cas communautaires ce qui doit le conduire à organiser des tests massifs pour éviter un confinement général aux risques sociaux et économiques incertains ;
Pour ces motifs,
Nous vous demandons d’enjoindre à l’Etat du Sénégal, à travers son Ministre en charge de la santé et de l’action sociale, de :
– procéder, par un dispositif adapté, à un test de dépistage massif des populations, de sorte que les défaillances constatées dans la circulation inquiétante du virus, susceptibles d’affecter la sécurité et la santé des citoyens, soient éliminées ;
– prendre toutes les mesures propres à faire respecter l’égal accès de toutes les personnes au test de dépistage ;
– évaluer de manière régulière et contrôler le fonctionnement des dispositifs de tests existants ;
– dégager les moyens nécessaires pour être utilisés à tout moment ;
– d’ordonner toutes mesures utiles en application de l’article 86 de la loi sur la Cour suprême.
Signature
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