C’est un tremblement de terre silencieux mais profond qui secoue l’Agence d’aménagement et de promotion des sites industriels (APROSI). Le licenciement brutal d’Aly Fary Ndiaye, cadre interne et membre déclaré du parti Pastef, suscite un vif émoi dans les couloirs de cette structure stratégique de l’État sénégalais. Derrière une procédure apparemment formelle, se dessine un affrontement aux relents politiques et éthiques, dans un contexte où la transparence publique est devenue un mot d’ordre.
Le feu aux poudres : un post Facebook devenu explosif
Tout part d’un message publié sur la page Facebook d’Aly Fary Ndiaye. Il y accuse nommément le directeur général, Amadou Guèye, d’une gestion « opaque et contraire à l’éthique », invoquant même le slogan de gouvernance du régime actuel : « Jubb, Jubbal, Jubbanti » (intégrité, reddition des comptes, et exemplarité). Parmi les griefs avancés : la location d’un véhicule à plus de 4 millions FCFA mensuels, alors qu’un véhicule de fonction parfaitement opérationnel était disponible, ainsi que des dépenses de 24 millions FCFA pour deux voyages à l’étranger jugés « injustifiés ».
Mais l’attaque va plus loin. Ndiaye affirme que le directeur général ne serait autre qu’Amadou Ngom Guèye, ancien ingénieur chez Renault, condamné avec sursis en France en 2020 pour des faits de violence contre le professeur Moussa Seydi, une personnalité médicale très respectée au Sénégal. Des révélations qui ont mis en ébullition les réseaux sociaux et les rangs militants de Pastef.
Une procédure express et sans appel
Face à ce qu’il considère comme une atteinte grave à son autorité et à l’image de l’agence, le DG Amadou Guèye a enclenché une procédure disciplinaire.
une première demande d’explications a été adressée à Ndiaye le 10 juin. S’en est suivie une sommation par huissier. La réponse du cadre, qualifiée d’« inopérante », n’a pas empêché son licenciement pour faute lourde, sans préavis ni indemnités, en dehors des congés non consommés.
Une mesure jugée sévère, voire expéditive, d’autant plus que l’inspection du travail, saisie du dossier, aurait rejeté la validité des sanctions, selon les sources Plus étonnant encore : la plainte déposée par le DG contre Ndiaye pour diffamation n’a pas été retenue par la justice.
Un lanceur d’alerte ou un cadre insubordonné ?
Aly Fary Ndiaye, lui, campe sur sa position de lanceur d’alerte, arguant qu’il a agi dans le cadre d’un devoir de vérité et de transparence, comme le recommande le programme présidentiel de rupture prôné par le tandem Diomaye Faye–Ousmane Sonko. Il a adressé un courrier officiel au chef de l’État et au Premier ministre, tous deux figures centrales de Pastef, leur demandant de se saisir du dossier.
Dans un contexte de forte polarisation politique et de lutte contre les mauvaises pratiques de gestion publique, l’affaire pourrait prendre une tournure nationale. Elle pose une question essentielle : les agents de l’État peuvent-ils encore dénoncer les dérives sans risquer leur poste ?
Une affaire aux ramifications politiques et morales
Au-delà du cas personnel d’Aly Fary Ndiaye, ce dossier met en lumière les tensions internes dans l’administration sénégalaise entre devoir de loyauté, droit à la dénonciation et appartenance politique. Il soulève aussi la question de la tolérance réelle du nouveau pouvoir envers les lanceurs d’alerte.
Car si les accusations de mauvaise gestion sont fondées, elles méritent enquête et clarification. Et si elles ne le sont pas, pourquoi la justice n’a-t-elle pas donné suite à la plainte du DG ? En l’état, l’APROSI se retrouve au centre d’un brasier administratif et politique, et c’est toute la promesse de rupture et de bonne gouvernance qui se retrouve interpellée.
Un dossier à suivre de près.
Mariata beye pour sunugal 24