Coup de tonnerre au sommet de l’administration sénégalaise. Une enquête menée par le Pôle judiciaire financier (PJF) vient d’éclabousser le ministère de la Communication, des Télécommunications et du Numérique, où plusieurs hauts fonctionnaires ont été arrêtés dans le cadre d’un vaste scandale de détournement présumé de fonds publics. À la clé : un marché de plusieurs milliards de francs CFA liés au Parc des Technologies Numériques (PTN) de Diamniadio… payé, mais jamais exécuté.
Un coup de filet spectaculaire
Selon les révélations , Amy Samaké, ex-directrice nationale de la Case des Tout-petits, et Hélène Ndoukité Diouf, actuelle Directrice de l’administration générale et de l’équipement (DAGE) du ministère, ont été interpellées puis déférées devant le procureur du Pôle financier.
Quatre autres individus, dont les noms n’ont pas encore été révélés à ce stade, seraient également mis en cause dans ce qui s’annonce comme l’un des plus gros scandales de l’ère post-Macky Sall. Tous sont soupçonnés d’avoir participé à un montage frauduleux autour d’un marché public d’envergure nationale.
Un projet fantôme à plusieurs milliards
Au cœur du dossier : un contrat faramineux portant sur la réalisation d’équipements et d’infrastructures pour le Parc des Technologies Numériques (PTN) de Diamniadio. Le projet, censé symboliser l’ambition numérique du Sénégal, aurait été payé à hauteur de plusieurs milliards de francs CFA… sans que les travaux n’aient jamais vu le jour.
L’enquête a été déclenchée à la suite d’une mission de vérification interne commanditée par le nouveau gouvernement. C’est la Section de recherches (SR) de la gendarmerie qui a été chargée des investigations. Le rapport initial évoque de « graves irrégularités », des procédures « opaques » et « l’absence totale de livrables ou de preuves d’exécution » malgré les décaissements.
La DAGE met en cause l’ancien ministre
Fait troublant : lors de ses premières auditions, Hélène Ndoukité Diouf aurait affirmé avoir agi « sur instructions directes » de Me Moussa Bocar Thiam, alors ministre en charge du département. Ce dernier, aujourd’hui hors du territoire, est par ailleurs maire de la commune de Ourossogui et cadre de l’Alliance pour la République (APR), le parti de l’ex-président Macky Sall.
Cette déclaration met un coup de projecteur sur la chaîne de commandement, et pourrait faire basculer l’affaire dans une dimension éminemment politique. Selon les enquêteurs, des convocations supplémentaires sont à l’étude, et l’ancien ministre pourrait faire l’objet d’un mandat d’amener ou d’un mandat d’arrêt international si sa responsabilité était confirmée.
Une affaire qui remonte jusqu’au sommet ?
Ce scandale tombe à un moment où les nouvelles autorités multiplient les audits dans plusieurs ministères, cherchant à redresser les comptes publics et à assainir la gestion des grands projets. Le cas du PTN de Diamniadio, symbole du virage technologique voulu par l’ancien régime, pourrait ainsi devenir l’illustration d’un système défaillant où impunité, négligence et mauvaise gouvernance ont prospéré.
Des voix s’élèvent déjà dans la société civile et au sein de l’Assemblée nationale pour exiger une transparence totale dans ce dossier. Plusieurs organisations anticorruption réclament la publication intégrale des marchés signés sous l’ancien ministère, ainsi qu’une mise à plat de la gestion du PTN, projet-phare au cœur de nombreuses promesses politiques.
Une onde de choc à venir
Alors que les arrestations se multiplient, et que le nom d’un ancien ministre commence à être cité publiquement, l’affaire pourrait rapidement prendre des proportions nationales. Elle pose à nouveau la question de la reddition des comptes, de l’efficacité des dispositifs de contrôle, et de la réelle volonté politique de tourner la page des scandales à répétition.
Le Sénégal entre-t-il dans une ère de rupture ou assiste-t-on à un nouveau feuilleton politico-judiciaire ? Les prochains jours seront déterminants pour mesurer la profondeur des responsabilités engagées – et la capacité des institutions à y faire face sans calcul ni complaisance.
Mariata beye pour sunugal 24